Recommandation Rec(2006)2
du Comité des Ministres aux Etats membres
sur les Règles pénitentiaires européennes [/strong]
Le Comité des Ministres, en vertu de l’article 15.b du Statut du Conseil de l’Europe,
Prenant en compte la Convention européenne des Droits de l’Homme ainsi que la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme ;
Prenant également en compte le travail mené par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants et plus particulièrement les normes qu’il a développés dans ses rapports généraux ;
Réitérant que nul ne peut être privé de sa liberté, à moins que cette privation de liberté constitue une mesure de dernier recours et qu’elle soit en conformité avec des procédures définies par la loi ;
Soulignant que l’exécution des peines privatives de liberté et la prise en charge des détenus nécessitent la prise en compte des impératifs de sécurité, de sûreté et de discipline et doivent, en même temps, garantir des conditions de détention qui ne portent pas atteinte à la dignité humaine et offrir des occupations constructives et une prise en charge permettant la préparation à leur réinsertion dans la société ;
Considérant qu’il est important que les Etats membres du Conseil de l’Europe continuent à mettre à jour et à respecter des principes communs au regard de leur politique pénitentiaire ;
Considérant en outre que le respect de tels principes communs renforcera la coopération internationale dans ce domaine ;
Ayant noté les changements sociaux importants qui ont influencé des développements significatifs dans le domaine pénal en Europe lors des deux dernières décennies ;
Approuvant encore une fois les normes contenues dans les recommandations du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, qui traitent des aspects spécifiques de la politique et pratique pénitentiaires et plus spécifiquement no R (89) 12 sur l’éducation en prison ; no R (93) 6 concernant les aspects pénitentiaires et criminologiques du contrôle des maladies transmissibles et notamment du sida, et les problèmes connexes de santé en prison ; no R (97) 12 sur le personnel chargé de l’application des sanctions et mesures ; no R (98) 7 relative aux aspects éthiques et organisationnels des soins de santé en milieu pénitentiaire ; no R (99) 22 concernant le surpeuplement des prisons et l’inflation carcérale ; Rec(2003)22 concernant la libération conditionnelle et Rec(2003)23 concernant la gestion par les administrations pénitentiaires des condamnés à perpétuité et des autres détenus de longue durée ;
Ayant à l’esprit l’Ensemble des règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus ;
Considérant que la Recommandation no R (87) 3 du Comité des Ministres sur les Règles pénitentiaires européennes doit être révisée et mise à jour de façon approfondie pour pouvoir refléter les développements qui sont survenus dans le domaine de la politique pénale, les pratiques de condamnation ainsi que de gestion des prisons en général en Europe,
Recommande aux gouvernements des Etats membres :
- de suivre dans l’élaboration de leurs législations ainsi que de leurs politiques et pratiques des règles contenues dans l’annexe à la présente recommandation qui remplace la Recommandation no R (87) 3 du Comité des Ministres sur les Règles pénitentiaires européennes ;
- de s’assurer que la présente recommandation et son exposé des motifs soient traduits et diffusés de façon la plus large possible et plus spécifiquement parmi les autorités judiciaires, le personnel pénitentiaire et les détenus eux-mêmes.
Annexe
Partie I Principes fondamentaux
1. Les personnes privées de liberté doivent être traitées dans le respect des droits de l’homme.
2. Les personnes privées de liberté conservent tous les droits qui ne leur ont pas été retirés selon la loi par la décision les condamnant à une peine d’emprisonnement ou les plaçant en détention provisoire.
3 Les restrictions imposées aux personnes privées de liberté doivent être réduites au strict nécessaire et doivent être proportionnelles aux objectifs légitimes pour lesquelles elles ont été imposées.
4. Le manque de ressources ne saurait justifier des conditions de détention violant les droits de l’homme.
5. La vie en prison est alignée aussi étroitement que possible sur les aspects positifs de la vie à l’extérieur de la prison.
6. Chaque détention est gérée de manière à faciliter la réintégration dans la société libre des personnes privées de liberté.
7. La coopération avec les services sociaux externes et, autant que possible, la participation de la société civile à la vie pénitentiaire doivent être encouragées.
8. Le personnel pénitentiaire exécute une importante mission de service public et son recrutement, sa formation et ses conditions de travail doivent lui permettre de fournir un haut niveau de prise en charge des détenus.
9 Toutes les prisons doivent faire l’objet d’une inspection gouvernementale régulière ainsi que du contrôle d’une autorité indépendante.
Champ d’application
10. 1. Les Règles pénitentiaires européennes s’appliquent aux personnes placées en détention provisoire par une autorité judiciaire ou privées de liberté à la suite d’une condamnation.
2. En principe, les personnes placées en détention provisoire par une autorité judiciaire et privées de liberté à la suite d’une condamnation ne peuvent être détenues que dans des prisons, à savoir des établissements réservés aux détenus relevant de ces deux catégories.
3. Les Règles s’appliquent aussi aux personnes :
a. détenues pour toute autre raison dans une prison ; ou
b. placées en détention provisoire par une autorité judiciaire ou privées de liberté à la suite d’une condamnation, mais qui sont, pour une raison quelconque, détenues dans d’autres endroits.
4. Toute personne détenue dans une prison ou dans les conditions mentionnées au paragraphe 3.b. est considérée comme un détenu aux fins des présentes Règles.
11. 1. Les mineurs de dix-huit ans ne devraient pas être détenus dans des prisons pour adultes, mais dans des établissements spécialement conçus à cet effet.
2. Si des mineurs sont néanmoins exceptionnellement détenus dans ces prisons, leur situation et leurs besoins doivent être régis par des règles spéciales.
12. 1. Les personnes souffrant de maladies mentales et dont l’état de santé mentale est incompatible avec la détention en prison devraient être détenues dans un établissement spécialement conçu à cet effet.
2. Si ces personnes sont néanmoins exceptionnellement détenues dans une prison, leur situation et leurs besoins doivent être régis par des règles spéciales.
13. Les présentes Règles doivent être appliquées avec impartialité, sans discrimination aucune fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.
Partie II Conditions de détention
Admission
14. Aucune personne ne peut être admise ou retenue dans une prison en qualité de détenu sans une ordonnance d’incarcération valable, conformément au droit interne.
15. 1. Au moment de l’admission, les informations suivantes concernant chaque nouveau détenu doivent immédiatement être consignées :
a. informations concernant l’identité du détenu ;
b. motif de sa détention et nom de l’autorité compétente l’ayant décidée ;
c. date et heure de son admission ;
d. liste des effets personnels du détenu qui seront placés en lieu sûr conformément à la Règle 31 ;
e. toute blessure visible et toute plainte de mauvais traitements antérieurs ; et
f. sous réserve des impératifs relatifs au secret médical, toute information sur l’état de santé du détenu significative pour le bien-être physique et mental de ce détenu ou des autres.
2. Au moment de l’admission, chaque détenu doit recevoir les informations prévues à la Règle 30.
3. Immédiatement après l’admission une notification de la détention du détenu doit être faite conformément à la Règle 24.9.
16. Dès que possible après l’admission :
a. les informations relatives à l’état de santé du détenu doivent être complétées par un examen médical conformément à la Règle 42 ;
b. le niveau de sécurité applicable à l’intéressé doit être déterminé conformément à la Règle 51 ;
c. le risque que fait peser l’intéressé doit être déterminé conformément à la Règle 52 ;
d. toute information existante sur la situation sociale du détenu doit être évaluée de manière à traiter ses besoins personnels et sociaux immédiats ; et
e. concernant les détenus condamnés, les mesures requises doivent être prises afin de mettre en place des programmes conformément à la partie VIII des présentes Règles.
Répartition et locaux de détention
17. 1. Les détenus doivent être répartis autant que possible dans des prisons situées près de leur foyer ou de leur centre de réinsertion sociale.
2. La répartition doit aussi prendre en considération les exigences relatives à la poursuite et aux enquêtes pénales, à la sécurité et à la sûreté, ainsi que la nécessité d’offrir des régimes appropriés à tous les détenus.
3. Dans la mesure du possible les détenus doivent être consultés concernant leur répartition initiale et concernant chaque transfèrement ultérieur d’une prison à une autre.
18. 1. Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au logement des détenus pendant la nuit, doivent satisfaire aux exigences de respect de la dignité humaine et, dans la mesure du possible, de la vie privée, et répondre aux conditions minimales requises en matière de santé et d’hygiène, compte tenu des conditions climatiques, notamment en ce qui concerne l’espace au sol, le volume d’air, l’éclairage, le chauffage et l’aération.
2. Dans tous les bâtiments où des détenus sont appelés à vivre, à travailler ou à se réunir :
a. les fenêtres doivent être suffisamment grandes pour que les détenus puissent lire et travailler à la lumière naturelle dans des conditions normales, et pour permettre l’entrée d’air frais, sauf s’il existe un système de climatisation approprié ;
b. la lumière artificielle doit être conforme aux normes techniques reconnues en la matière ; et
c. un système d’alarme doit permettre aux détenus de contacter le personnel immédiatement.
3. Le droit interne doit définir les conditions minimales requises concernant les points répertoriés aux paragraphes 1 et 2.
4. Le droit interne doit prévoir des mécanismes garantissant que le respect de ces conditions minimales ne soit pas atteint à la suite du surpeuplement carcéral.
5. Chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle, sauf lorsqu’il est considéré comme préférable pour lui qu’il cohabite avec d’autres détenus.
6. Une cellule doit être partagée uniquement si elle est adaptée à un usage collectif et doit être occupée par des détenus reconnus aptes à cohabiter.
7. Dans la mesure du possible, les détenus doivent pouvoir choisir avant d’être contraints de partager une cellule pendant la nuit.
8. La décision de placer un détenu dans une prison ou une partie de prison particulière doit tenir compte de la nécessité de séparer :
a. les prévenus des détenus condamnés ;
b. les détenus de sexe masculin des détenus de sexe féminin ; et
c. les jeunes détenus adultes des détenus plus âgés.
9. Il peut être dérogé aux dispositions du paragraphe 8 en matière de séparation des détenus afin de permettre à ces derniers de participer ensemble à des activités organisées. Cependant les groupes visés doivent toujours être séparés la nuit, à moins que les intéressés ne consentent à cohabiter et que les autorités pénitentiaires estiment que cette mesure s’inscrit dans l’intérêt de tous les détenus concernés.
10. Les conditions de logement des détenus doivent satisfaire aux mesures de sécurité les moins restrictives possible et compatibles avec le risque que les intéressés s’évadent, se blessent ou blessent d’autres personnes.
Hygiène
19. 1. Tous les locaux d’une prison doivent être maintenus en état et propres à tout moment.
2. Les cellules ou autres locaux affectés à un détenu au moment de son admission doivent être propres.
3. Les détenus doivent jouir d’un accès facile à des installations sanitaires hygiéniques et protégeant leur intimité.
4. Les installations de bain et de douche doivent être suffisantes pour que chaque détenu puisse les utiliser, à une température adaptée au climat, de préférence quotidiennement mais au moins deux fois par semaine (ou plus fréquemment si nécessaire) conformément aux préceptes généraux d’hygiène.
5. Les détenus doivent veiller à la propreté et à l’entretien de leur personne, de leurs vêtements et de leur logement.
6. Les autorités pénitentiaires doivent leur fournir les moyens d’y parvenir, notamment par des articles de toilette ainsi que des ustensiles de ménage et des produits d’entretien.
7. Des mesures spéciales doivent être prises afin de répondre aux besoins hygiéniques des femmes.
Vêtements et literie
20. 1. Tout détenu dépourvu de vêtements personnels adéquats doit recevoir des vêtements adaptés au climat.
2. Ces vêtements ne doivent être ni dégradants, ni humiliants.
3. Ces vêtements doivent être maintenus en bon état et remplacés si nécessaire.
4. Quand un détenu obtient la permission de sortir de prison, il ne doit pas être contraint de porter des vêtements faisant état de sa condition de détenu.
21. Chaque détenu doit disposer d’un lit séparé et d’une literie individuelle convenable, entretenue correctement et renouvelée à des intervalles suffisamment rapprochés pour en assurer la propreté.
Régime alimentaire
22. 1. Les détenus doivent bénéficier d’un régime alimentaire tenant compte de leur âge, de leur état de santé, de leur état physique, de leur religion, de leur culture et de la nature de leur travail.
2. Le droit interne doit déterminer les critères de qualité du régime alimentaire en précisant notamment son contenu énergétique et protéinique minimal.
3. La nourriture doit être préparée et servie dans des conditions hygiéniques.
4. Trois repas doivent être servis tous les jours à des intervalles raisonnables.
5. Les détenus doivent avoir accès à tout moment à l’eau potable.
6. Le médecin ou un(e) infirmier(ère) qualifié(e) doit prescrire la modification du régime alimentaire d’un détenu si cette mesure apparaît nécessaire pour des raisons médicales.
Conseils juridiques
23. 1. Tout détenu a le droit de solliciter des conseils juridiques et les autorités pénitentiaires doivent raisonnablement l’aider à avoir accès à de tels conseils.
2. Tout détenu a le droit de consulter à ses frais un avocat de son choix sur n’importe quel point de droit.
3. Lorsque la législation prévoit un système d’aide judiciaire gratuite, cette possibilité doit être portée à l’attention de tous les détenus par les autorités pénitentiaires.
4. Les consultations et autres communications - y compris la correspondance - sur des points de droit entre un détenu et son avocat doivent être confidentielles.
5. Une autorité judiciaire peut, dans des circonstances exceptionnelles, autoriser des dérogations à ce principe de confidentialité dans le but d’éviter la perpétration d’un délit grave ou une atteinte majeure à la sécurité et à la sûreté de la prison.
6. Les détenus doivent pouvoir accéder aux documents relatifs aux procédures judiciaires les concernant, ou bien être autorisés à les garder en leur possession.
Contacts avec le monde extérieur
24. 1. Les détenus doivent être autorisés à communiquer aussi fréquemment que possible - par lettre, par téléphone ou par d’autres moyens de communication - avec leur famille, des tiers et des représentants d’organismes extérieurs, ainsi qu’à recevoir des visites desdites personnes.
2. Toute restriction ou surveillance des communications et des visites nécessaire à la poursuite et aux enquêtes pénales, au maintien du bon ordre, de la sécurité et de la sûreté, ainsi qu’à la prévention d’infractions pénales et à la protection des victimes - y compris à la suite d’une ordonnance spécifique délivrée par une autorité judiciaire - doit néanmoins autoriser un niveau minimal acceptable de contact.
3. Le droit interne doit préciser les organismes nationaux et internationaux, ainsi que les fonctionnaires, avec lesquels les détenus peuvent communiquer sans restrictions.
4. Les modalités des visites doivent permettre aux détenus de maintenir et de développer des relations familiales de façon aussi normale que possible.
5. Les autorités pénitentiaires doivent aider les détenus à maintenir un contact adéquat avec le monde extérieur et leur fournir l’assistance sociale appropriée pour ce faire.
6. Dès réception, l’information du décès ou de la maladie grave d’un proche parent doit être communiquée au détenu.
7. Lorsque les circonstances le permettent, le détenu doit être autorisé à quitter la prison - soit sous escorte, soit librement - pour rendre visite à un parent malade, assister à des obsèques ou pour d’autres raisons humanitaires.
8. Tout détenu doit avoir le droit d’informer immédiatement sa famille de sa détention ou de son transfèrement dans un autre établissement, ainsi que de toute maladie ou blessure grave dont il souffre.
9. En cas d’admission d’un détenu dans une prison, de décès, de maladie grave, de blessure sérieuse ou de transfèrement dans un hôpital, les autorités - sauf demande contraire du détenu - doivent informer immédiatement son conjoint ou son compagnon ou bien, si l’intéressé est célibataire, le parent le plus proche et toute autre personne préalablement désignée par le détenu.
10. Les détenus doivent pouvoir se tenir régulièrement informés des affaires publiques, en pouvant s’abonner et en lisant des journaux quotidiens, des périodiques et d’autres publications, et en suivant des émissions de radio ou de télévision, à moins qu’une interdiction n’ait été prononcée par une autorité judiciaire dans un cas individuel et pour une durée spécifiée.
. 11. Les autorités pénitentiaires doivent veiller à ce que les détenus puissent participer aux élections, aux référendums et aux autres aspects de la vie publique, à moins que l’exercice de ce droit par les intéressés ne soit limité en vertu du droit interne.
12. Les détenus doivent être autorisés à communiquer avec les médias, à moins que des raisons impératives ne s’y opposent au nom de la sécurité et de la sûreté, de l’intérêt public ou de la protection des victimes, des autres détenus et du personnel.
Régime pénitentiaire
25. 1. Le régime prévu pour tous les détenus doit offrir un programme d’activités équilibré.
2. Ce régime doit permettre à tous les détenus de passer chaque jour hors de leur cellule autant de temps que nécessaire pour assurer un niveau suffisant de contacts humains et sociaux.
3. Ce régime doit aussi pourvoir aux besoins sociaux des détenus.
4. Une attention particulière doit être portée aux besoins des détenus qui ont subi des violences physiques, mentales ou sexuelles.
Travail
26. 1. Le travail en prison doit être considéré comme un élément positif du régime carcéral et en aucun cas être imposé comme une punition.
2. Les autorités pénitentiaires doivent s’efforcer de procurer un travail suffisant et utile.
3. Ce travail doit permettre, dans la mesure du possible, d’entretenir ou d’augmenter la capacité du détenu à gagner sa vie après sa sortie de prison.
4. Conformément à la Règle 13, aucune discrimination fondée sur le sexe ne doit s’exercer dans l’attribution d’un type de travail.
5. Un travail incluant une formation professionnelle doit être proposé aux détenus en mesure d’en profiter et plus particulièrement aux jeunes.
6. Dans la mesure du possible, les détenus doivent pouvoir choisir le type de travail qu’ils désirent accomplir, sous réserve des limites inhérentes à une sélection professionnelle appropriée et des exigences du maintien du bon ordre et de la discipline.
7. L’organisation et les méthodes de travail dans les prisons doivent se rapprocher autant que possible de celles régissant un travail analogue hors de la prison, afin de préparer les détenus aux conditions de la vie professionnelle normale.
8. Bien que le fait de tirer un profit financier du travail pénitentiaire puisse avoir pour effet d’élever le niveau et d’améliorer la qualité et la pertinence de la formation, les intérêts des détenus ne doivent cependant pas être subordonnés à cette fin.
9. Le travail des détenus doit être procuré par les autorités pénitentiaires, avec ou sans le concours d’entrepreneurs privés, à l’intérieur ou à l’extérieur de la prison.
10. En tout état de cause, le travail des détenus doit être rémunéré de façon équitable.
11. Les détenus doivent pouvoir consacrer au moins une partie de leur rémunération à l’achat d’objets autorisés destinés à leur usage personnel et à en envoyer une autre partie à leur famille.
12. Les détenus peuvent être incités à économiser une partie de leur rémunération et doivent pouvoir récupérer cette somme à leur sortie de prison ou l’affecter à d’autres usages autorisés.
13. Les mesures appliquées en matière de santé et de sécurité doivent assurer une protection efficace des détenus et ne peuvent pas être moins rigoureuses que celles dont bénéficient les travailleurs hors de prison.
14. Des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles dans des conditions non moins favorables que celles prévues par le droit interne pour les travailleurs hors de prison.
15. Le nombre quotidien et hebdomadaire maximal d’heures de travail des détenus doit être fixé conformément à la réglementation ou aux usages locaux concernant l’emploi des travailleurs libres.
16. Les détenus doivent bénéficier d’au moins une journée de repos hebdomadaire et de suffisamment de temps pour s’instruire et s’adonner à d’autres activités.
17. Les détenus exerçant un travail doivent, dans la mesure du possible, être affiliés au régime national de sécurité sociale.
Exercice physique et activités récréatives
27. 1. Tout détenu doit avoir l’opportunité, si le temps le permet, d’effectuer au moins une heure par jour d’exercice en plein air.
2. En cas d’intempérie, des solutions de remplacement doivent être proposées aux détenus désirant faire de l’exercice.
3. Des activités correctement organisées - conçues pour maintenir les détenus en bonne forme physique, ainsi que pour leur permettre de faire de l’exercice et de se distraire - doivent faire partie intégrante des régimes carcéraux.
4. Les autorités pénitentiaires doivent faciliter ce type d’activités en fournissant les installations et les équipements appropriés.
5. Les autorités pénitentiaires doivent prendre des dispositions spéciales pour organiser, pour les détenus qui en auraient besoin, des activités particulières.
6. Des activités récréatives - comprenant notamment du sport, des jeux, des activités culturelles, des passe-temps et la pratique de loisirs actifs - doivent être proposées aux détenus et ces derniers doivent, autant que possible, être autorisés à les organiser.
7. Les détenus doivent être autorisés à se réunir dans le cadre des séances d’exercice physique et de la participation à des activités récréatives.
Education
28. 1. Toute prison doit s’efforcer de donner accès à tous les détenus à des programmes d’enseignement qui soient aussi complets que possible et qui répondent à leurs besoins individuels tout en tenant compte de leurs aspirations.
2. Priorité doit être donnée aux détenus qui ne savent pas lire ou compter et à ceux qui n’ont pas d’instruction élémentaire ou de formation professionnelle.
3. Une attention particulière doit être portée à l’éducation des jeunes détenus et de ceux ayant des besoins particuliers.
4. L’instruction doit, du point de vue des régimes carcéraux, être considérée au même titre que le travail et les détenus ne doivent pas être pénalisés, que ce soit financièrement ou d’une autre manière, par leur participation à des activités éducatives.
5. Chaque établissement doit disposer d’une bibliothèque destinée à tous les détenus, disposant d’un fonds satisfaisant de ressources variées, à la fois récréatives et éducatives, de livres et d’autres supports.
6. Partout où cela est possible, la bibliothèque de la prison devrait être organisée avec le concours des biblio¬thèques publiques.
7. Dans la mesure du possible, l’instruction des détenus :
a. doit être intégrée au système d’éducation et de formation professionnelle publique, afin que les intéressés puissent poursuivre aisément leur éducation et formation professionnelle après leur sortie de prison ; et
b. doit être dispensée sous l’égide d’établissements d’enseignement externes.
Liberté de pensée, de conscience et de religion
29. 1. Le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion des détenus doit être respecté.
2. Le régime carcéral doit être organisé, autant que possible, de manière à permettre aux détenus de pratiquer leur religion et de suivre leur philosophie, de participer à des services ou réunions menés par des représentants agréés des dites religions ou philosophies, de recevoir en privé des visites de tels représentants de leur religion ou leur philosophie et d’avoir en leur possession des livres ou publications à caractère religieux ou spirituel.
3. Les détenus ne peuvent être contraints de pratiquer une religion ou de suivre une philosophie, de participer à des services ou des réunions religieux, de participer à des pratiques religieuses ou bien d’accepter la visite d’un représentant d’une religion ou d’une philosophie quelconque.
Information
30. 1. Lors de son admission et ensuite aussi souvent que nécessaire, chaque détenu doit être informé par écrit et oralement - dans une langue qu’il comprend - de la réglementation relative à la discipline, ainsi que de ses droits et obligations en prison.
2. Tout détenu doit être autorisé à garder en sa possession la version écrite des informations lui ayant été communiquées.
3. Tout détenu doit être informé des procédures judiciaires auxquelles il est partie et, en cas de condamnation, de la durée de sa peine et de ses possibilités de libération anticipée.
Objets appartenant aux détenus
31. 1. Les objets qui ne peuvent pas rester en possession d’un détenu, en vertu du règlement intérieur, doivent être placés en lieu sûr lors de l’admission dans la prison.
2. Tout détenu dont les objets sont placés en lieu sûr doit signer un inventaire dressé en conséquence.
3. Des mesures doivent être prises pour conserver ces objets en bon état.
4. S’il s’avère nécessaire de détruire un objet, ce fait doit être consigné et le détenu informé.
5. Les détenus doivent avoir le droit, sous réserve des restrictions et règles relatives à l’hygiène, au bon ordre et à la sûreté, de s’acheter ou d’obtenir des marchandises, y compris des aliments et des boissons, à des prix qui ne soient pas anormalement supérieurs à ceux pratiqués à l’extérieur.
6. Si un détenu est en possession de médicaments au moment de son admission, le médecin doit décider de l’usage à en faire.
7. Si les détenus sont autorisés à conserver des objets en leur possession, les autorités pénitentiaires doivent prendre des mesures permettant de garder lesdits objets en sécurité.
Transfèrement des détenus
32. 1. Au cours de leur transfert vers une prison, ainsi que vers d’autres endroits tels que le tribunal ou l’hôpital, les détenus doivent être exposés aussi peu que possible à la vue du public et les autorités doivent prendre des mesures pour protéger leur anonymat.
2. Le transport des détenus dans des véhicules mal aérés ou mal éclairés ou bien dans des conditions leur imposant une souffrance physique ou une humiliation évitables doit être interdit.
3. Le transport des détenus doit être assuré aux frais des autorités publiques et sous leur direction.
Libération des détenus
33. 1. Tout détenu doit être libéré sans tarder dès l’expiration de l’ordonnance prévoyant son incarcération ou dès qu’un tribunal ou une autre autorité en décide ainsi.
2. La date et l’heure de la libération doivent être consignées.
3. Tout détenu doit bénéficier de dispositions visant à faciliter son retour dans la société après sa libération.
4. Lors de sa libération, tout détenu doit récupérer l’argent et les objets dont il a été dépossédé et qui ont été placés en lieu sûr, à l’exception des sommes qu’il a régulièrement prélevées, ainsi que des objets qu’il a été autorisé à envoyer à l’extérieur ou qui ont dû être détruits par mesure d’hygiène.
5. Le détenu doit signer une décharge relative aux biens restitués.
6. Lorsque la libération est fixée en avance, le détenu doit se voir proposer un examen médical conformément à la Règle 42, aussi peu de temps que possible avant l’heure de sa libération.
7. Des dispositions doivent être prises pour s’assurer que chaque détenu libéré dispose des documents et pièces d’identité nécessaires, et reçoive une aide en matière de recherche d’un logement approprié et d’un travail.
8. Le détenu doit également être pourvu des moyens immédiatement nécessaires à sa subsistance, doté de vêtements convenables et appropriés au climat et à la saison, et doté des moyens suffisants pour arriver à destination.
Femmes
34. 1. Outre les dispositions des présentes Règles visant spécifiquement les détenues, les autorités doivent également respecter les besoins des femmes, entre autres aux niveaux physique, professionnel, social et psychologique, au moment de prendre des décisions affectant l’un ou l’autre aspect de leur détention.
2. Des efforts particuliers doivent être déployés pour permettre l’accès à des services spécialisés aux détenues qui ont des besoins tels que mentionnés à la Règle 25.4.
3. Les détenues doivent être autorisées à accoucher hors de prison mais, si un enfant vient à naître dans l’établissement, les autorités doivent fournir l’assistance et les infrastructures nécessaires.
Mineurs
35. 1. Lorsque des mineurs de dix-huit ans sont exceptionnellement détenus dans une prison pour adultes, les autorités doivent veiller à ce qu’ils puissent accéder non seulement aux services offerts à tous les détenus, mais aussi aux services sociaux, psychologiques et éducatifs, à un enseignement religieux et à des programmes récréatifs ou à des activités similaires, tels qu’ils sont accessibles aux mineurs vivant en milieu libre.
2. Tout mineur détenu ayant l’âge de la scolarité obligatoire doit avoir accès à un tel enseignement.
3. Une aide supplémentaire doit être octroyée aux mineurs libérés de prison.
4. Lorsque des mineurs sont détenus en prison, ils doivent résider dans une partie de la prison séparée de celles abritant des adultes, sauf si cela est contraire à l’intérêt de l’enfant.
Enfants en bas âge
36. 1. Les enfants en bas âge peuvent rester en prison avec un parent incarcéré, uniquement si tel est l’intérêt de l’enfant concerné. Ils ne doivent pas être considérés comme des détenus.
2. Lorsque des enfants en bas âge sont autorisés à rester en prison avec un parent, des mesures spéciales doivent être prises pour disposer d’une crèche dotée d’un personnel qualifié, où les enfants sont placés quand le parent pratique une activité dont l’accès n’est pas permis aux enfants en bas âge.
3. Une infrastructure spéciale doit être réservé afin de protéger le bien-être de ces enfants en bas âge.
Ressortissants étrangers
37. 1. Les détenus ressortissants d’un pays étranger doivent être informés, sans délai, de leur droit de prendre contact avec leurs représentants diplomatiques ou consulaires et bénéficier de moyens raisonnables pour établir cette communication.
2. Les détenus ressortissants d’Etats n’ayant pas de représentants diplomatiques ou consulaires dans le pays, ainsi que les réfugiés et les apatrides, doivent bénéficier des mêmes facilités et être autorisés à s’adresser au représentant diplomatique de l’Etat chargé de leurs intérêts ou à toute autre autorité nationale ou internationale dont la mission est de protéger lesdits intérêts.
3. Les autorités pénitentiaires doivent coopérer étroitement avec ces représentants diplomatiques ou consulaires dans l’intérêt des ressortissants étrangers incarcérés qui peuvent avoir des besoins particuliers.
4. Des informations portant spécifiquement sur l’aide judiciaire doivent être fournies aux détenus ressortissants étrangers.
5. Les détenus ressortissants étrangers doivent être informés de la possibilité de solliciter le transfert vers un autre pays en vue de l’exécution de leur peine.
Minorités ethniques ou linguistiques
38. 1. Des arrangements spéciaux doivent être pris concernant les besoins des détenus appartenant à une minorité ethnique ou linguistique.
2. Dans toute la mesure du possible, les pratiques culturelles des différents groupes doivent pouvoir continuer à être observées en prison.
3. Les besoins linguistiques doivent être couverts en recourant à des interprètes compétents et en remettant des brochures d’information rédigées dans les différentes langues parlées dans chaque prison.
Partie III Santé
Soins de santé
39. Les autorités pénitentiaires doivent protéger la santé de tous les détenus dont elles ont la garde.
Organisation des soins de santé en prison
40. 1. Les services médicaux administrés en prison doivent être organisés en relation étroite avec l’administration générale du service de santé de la collectivité locale ou de l’Etat.
2. La politique sanitaire dans les prisons doit être intégrée à la politique nationale de santé publique et compatible avec cette dernière.
3. Les détenus doivent avoir accès aux services de santé proposés dans le pays sans aucune discrimination fondée sur leur situation juridique.
4. Les services médicaux de la prison doivent s’efforcer de dépister et de traiter les maladies physiques ou mentales, ainsi que les déficiences dont souffrent éventuellement les détenus.
5. A cette fin, chaque détenu doit bénéficier des soins médicaux, chirurgicaux et psychiatriques requis, y compris ceux disponibles en milieu libre.
Personnel médical et soignant
41. 1. Chaque prison doit disposer des services d’au moins un médecin généraliste.
2. Des dispositions doivent être prises pour s’assurer à tout moment qu’un médecin diplômé interviendra sans délai en cas d’urgence.
3. Les prisons ne disposant pas d’un médecin exerçant à plein temps doivent être régulièrement visitées par un médecin exerçant à temps partiel.
4. Chaque prison doit disposer d’un personnel ayant suivi une formation médicale appropriée.
5. Tout détenu doit pouvoir bénéficier des soins de dentistes et d’ophtalmologues diplômés.
Devoirs du médecin
42. 1. Le médecin ou un(e) infirmier(ère) qualifié(e) dépendant de ce médecin doit voir chaque détenu le plus tôt possible après son admission et doit l’examiner, sauf si cela n’est manifestement pas nécessaire.
2. Le médecin ou un(e) infirmier(ère) qualifié(e) dépendant de ce médecin doit examiner les détenus s’ils le demandent avant leur libération et doit sinon examiner les détenus aussi souvent que nécessaire.
3. Lorsqu’il examine un détenu, le médecin, ou un(e) infirmier(ère) qualifié(e) dépendant de ce médecin, doit accorder une attention particulière :
a. au respect des règles ordinaires du secret médical ;
b. au diagnostic des maladies physiques ou mentales et aux mesures requises par leur traitement et par la nécessité de continuer un traitement médical existant ;
c. à la consignation et au signalement aux autorités compétentes de tout signe ou indication permettant de penser que des détenus auraient pu subir des violences ;
d. aux symptômes de manque consécutifs à une consommation de stupéfiants, de médicaments ou d’alcool ;
e. à l’identification de toute pression psychologique ou autre tension émotionnelle due à la privation de liberté ;
f. à l’isolement des détenus suspectés d’être atteints de maladies infectieuses ou contagieuses, pendant la période où ils sont contagieux, et à l’administration d’un traitement approprié aux intéressés ;
g. au non-isolement des détenus pour la seule raison qu’ils sont séropositifs ;
h. à l’identification des problèmes de santé physique ou mentale qui pourraient faire obstacle à la réinsertion de l’intéressé après sa libération ;
i. à la détermination de la capacité de l’intéressé à travailler et à faire de l’exercice ;
j. à la conclusion d’accords avec les services de la collectivité afin que tout traitement psychiatrique ou médical indispensable à l’intéressé puisse être poursuivi après sa libération, si le détenu donne son consentement à cet accord.
43. 1. Le médecin doit être chargé de surveiller la santé physique et mentale des détenus et doit voir, dans les conditions et au rythme prévus par les normes hospitalières, les détenus malades, ceux qui se plaignent d’être malades ou blessés, ainsi que tous ceux ayant été spécialement portés à son attention.
2. Le médecin ou un(e) infirmier(ère) qualifié(e) dépendant de ce médecin doit prêter une attention particulière à la santé des détenus dans des conditions d’isolement cellulaire, doit leur rendre visite quotidiennement ; et doit leur fournir promptement une assistance médicale et un traitement, à leur demande ou à la demande du personnel pénitentiaire.
3. Le médecin doit présenter un rapport au directeur chaque fois qu’il estime que la santé physique ou mentale d’un détenu encourt des risques graves du fait de la prolongation de la détention ou en raison de toute condition de détention, y compris celle d’isolement cellulaire.
44. Le médecin ou une autorité compétente doit faire des inspections régulières, si nécessaire collecter des informations par d’autres moyens et conseiller le directeur concernant :
a. la quantité, la qualité, la préparation et la distribution des aliments et de l’eau ;
b. l’hygiène et la propreté de la prison et des détenus ;
c. les installations sanitaires, le chauffage, l’éclairage et la ventilation de la prison ; et
d. la qualité et la propreté des vêtements et de la literie des détenus.
45. 1. Le directeur doit tenir compte des rapports et conseils du médecin ou de l’autorité compétente mentionnés dans les Règles 41 et 42 et, s’il approuve les recommandations formulées, prendre immédiatement des mesures pour les mettre en œuvre.
2. Si les recommandations formulées par le médecin échappent à la compétence du directeur ou n’emportent pas son accord, ledit directeur doit immédiatement soumettre l’avis du praticien et son propre rapport aux instances supérieures.
Administration des soins de santé
46. 1. Les détenus malades nécessitant des soins médicaux particuliers doivent être transférés vers des établissements spécialisés ou vers des hôpitaux civils, lorsque ces soins ne sont pas dispensés en prison.
2. Lorsqu’une prison dispose de son propre hôpital, celui-ci doit être doté d’un personnel et d’un équipement en mesure d’assurer les soins et les traitements appropriés aux détenus qui lui sont transférés.
Santé mentale
47. 1. Des institutions ou sections spécialisées placées sous contrôle médical doivent être organisées pour l’observation et le traitement de détenus atteints d’affections ou de troubles mentaux qui ne relèvent pas nécessairement des dispositions de la Règle 12.
2. Le service médical en milieu pénitentiaire doit assurer le traitement psychiatrique de tous les détenus requérant une telle thérapie et apporter une attention particulière à la prévention du suicide.
Autres questions
48. 1. Les détenus ne doivent pas être soumis à des expériences sans leur consentement.
2. Les expériences impliquant des détenus et pouvant provoquer des blessures physiques, une souffrance morale ou d’autres atteintes à leur santé doivent être interdites.
Partie IV Bon ordre
Approche générale
49. Le bon ordre dans la prison doit être maintenu en prenant en compte les impératifs de sécurité, de sûreté et de discipline, tout en assurant aux détenus des conditions de vie qui respectent la dignité humaine et en leur offrant un programme complet d’activités, conformément à la Règle 25.
50. Sous réserve des impératifs de bon ordre, de sûreté et de sécurité, les détenus doivent être autorisés à discuter de questions relatives à leurs conditions générales de détention et doivent être encouragés à communiquer avec les autorités pénitentiaires à ce sujet.
Sécurité
51. 1. Les mesures de sécurité appliquées aux détenus individuels doivent correspondre au minimum requis pour assurer la sécurité de leur détention.
2. La sécurité assurée par des barrières physiques et autres moyens techniques doit être complétée par une sécurité dynamique assurée par des membres du personnel alertes connaissant bien les détenus dont ils ont la charge.
3. Aussi rapidement que possible après son admission, chaque détenu doit être évalué afin de déterminer :
a. le risque qu’il ferait peser sur la collectivité en cas d’évasion ;
b. la probabilité qu’il tente de s’évader seul ou avec l’aide de complices extérieurs.
4. Chaque détenu est ensuite soumis à un régime de sécurité correspondant au niveau de risque identifié.
5. Le niveau de sécurité nécessaire doit être réévalué régulièrement pendant la détention de l’intéressé.
Sûreté
52. 1. Aussi rapidement que possible après son admission, chaque détenu doit être évalué afin de déterminer s’il pose un risque pour la sécurité des autres détenus, du personnel pénitentiaire ou des personnes travaillant dans la prison ou la visitant régulièrement, ainsi que pour établir s’il présente un risque pour lui-même.
2. Des procédures doivent être mises en place pour assurer la sécurité des détenus, du personnel pénitentiaire et de tous les visiteurs, ainsi que pour réduire au minimum les risques de violences et autres incidents qui pourraient menacer la sécurité.
3. Tous les efforts possibles doivent être déployés pour permettre aux détenus de participer pleinement et en toute sécurité aux activités journalières.
4. Les détenus doivent être en mesure de contacter le personnel à tout instant, y compris la nuit.
5. Le droit interne en matière de santé et de sécurité doit s’appliquer également dans les prisons.
Mesures spéciales de haute sécurité ou de sûreté
53. 1. Le recours à des mesures de haute sécurité ou de sûreté n’est autorisé que dans des circonstances exceptionnelles.
2. Des procédures claires, à appliquer à l’occasion du recours à de telles mesures pour tous détenus, doivent être établies.
3. La nature de ces mesures, leur durée et les motifs permettant d’y recourir doivent être déterminés par le droit interne.
4. L’application des mesures doit être, dans chaque cas, approuvée par l’autorité compétente pour une période donnée.
5. Toute décision d’extension de la période d’application doit faire l’objet d’une nouvelle approbation par l’autorité compétente.
6. Ces mesures doivent être appliquées à des individus et non à des groupes de détenus.
7. Tout détenu soumis à de telles mesures a le droit de déposer une plainte selon la procédure prévue à la Règle 70.
Fouilles et contrôles
54. 1. Le personnel doit suivre des procédures détaillées lorsqu’il fouille :
a. des endroits où des détenus vivent, travaillent et se rassemblent ;
b. des détenus ;
c. des visiteurs et leurs effets ; et
d. des membres du personnel.
2. Les situations dans lesquelles ces fouilles s’imposent, ainsi que leur nature, doivent être définies par le droit interne.
3. Le personnel doit être formé à mener ces fouilles en vue de détecter et de prévenir les tentatives d’évasion ou de dissimulation d’objets entrés en fraude, tout en respectant la dignité des personnes fouillées et leurs effets personnels.
4. Les personnes fouillées ne doivent pas être humiliées par le processus de fouille.
5. Les personnes peuvent uniquement être fouillées par un membre du personnel du même sexe.
6. Aucun examen des cavités corporelles ne peut être effectué par le personnel pénitentiaire.
7. Un examen intime dans le cadre d’une fouille ne peut être réalisé que par un médecin.
8. Tous les détenus doivent assister à la fouille de leurs effets personnels, à moins que les techniques de fouille ou le danger potentiel que cela représente pour le personnel ne l’interdise.
9. L’obligation de protéger la sécurité et la sûreté doit être mise en balance avec le respect de l’intimité des visiteurs.
10. Les procédures de contrôle des visiteurs professionnels - avocats, travailleurs sociaux, médecins, etc. - doivent être établies en accord avec leurs organisations représentatives, de manière à trouver un équilibre entre la sécurité et la sûreté d’une part et le droit à la confidentialité des communications entre ces praticiens et leurs clients ou patients d’autre part.
Infractions pénales
55. Toute allégation d’infraction pénale commise en prison doit faire l’objet de la même enquête que celle réservée aux actes du même type commis à l’extérieur, et doit être traitée conformément au droit interne.
Discipline et sanctions
56. 1. Les procédures disciplinaires doivent être des mécanismes de dernier ressort.
2. Dans toute la mesure du possible, les autorités pénitentiaires doivent recourir à des mécanismes de restauration et de médiation pour résoudre leurs différends avec les détenus et les disputes entre ces derniers.
57. 1. Seul un comportement susceptible de faire peser une menace sur le bon ordre, la sûreté et la sécurité peut être défini comme une infraction disciplinaire.
2. Le droit interne doit déterminer :
a. les actes ou omissions des détenus constituant une infraction disciplinaire ;
b. les procédures à suivre en matière disciplinaire ;
c. le type et la durée des sanctions disciplinaires pouvant être infligées ;
d. l’autorité compétente pour infliger ces sanctions ; et
e. l’instance pouvant être saisie d’un recours et la procédure d’appel.
58. Toute allégation de violation des règles de discipline par un détenu doit être signalée rapidement à l’autorité compétente qui doit lancer une enquête sans délai.
59. Tout détenu accusé d’une infraction disciplinaire doit :
a. être informé rapidement, dans une langue qu’il comprend et en détail, de la nature des accusations portées contre lui ;
b. disposer d’un délai et de moyens suffisants pour préparer sa défense ;
c. être autorisé à se défendre seul ou avec une assistance judiciaire, lorsque l’intérêt de la justice l’exige ;
d. être autorisé à demander la comparution de témoins et à les interroger ou à les faire interroger ;
e. bénéficier de l’assistance gratuite d’un interprète s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue utilisée pendant l’audience.
60. 1. Toute sanction infligée à la suite de la condamnation d’un détenu ayant commis une infraction disciplinaire doit être conforme au droit interne.
2. La sévérité de la sanction doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction.
3. Les sanctions collectives, les peines corporelles, le placement dans une cellule obscure, ainsi que toute autre forme de sanction inhumaine ou dégradante doivent être interdites.
4. La sanction ne peut pas consister en une interdiction totale des contacts avec la famille.
5. La mise à l’isolement ne peut être imposée à titre de sanction que dans des cas exceptionnels et pour une période définie et aussi courte que possible.
6. Les moyens de contrainte ne doivent jamais être utilisés à titre de sanction.
61. Tout détenu reconnu coupable d’une infraction disciplinaire doit pouvoir intenter un recours devant une instance supérieure compétente et indépendante.
62. Aucun détenu ne peut occuper dans la prison un emploi ou un poste lui conférant des pouvoirs disciplinaires.
Double incrimination
63. Aucun détenu ne peut être puni deux fois pour les mêmes faits ou la même conduite.
Recours à la force
64. 1. Le personnel pénitentiaire ne doit pas utiliser la force contre les détenus, sauf en cas de légitime défense, de tentative d’évasion ou de résistance active ou passive à un ordre licite et toujours en dernier recours.
2. La force utilisée doit correspondre au minimum nécessaire et être imposée pour une période aussi courte que possible.
65. Des procédures détaillées doivent régir le recours à la force et préciser notamment :
a. les divers types de recours à la force envisageables ;
b. les circonstances dans lesquelles chaque type de recours à la force est autorisé ;
c. les membres du personnel habilités à appliquer tel ou tel type de recours à la force ;
d. le niveau d’autorité requis pour décider d’un recours à la force ;
e. les rapports à rédiger après chaque recours à la force.
66. Le personnel en contact direct avec les détenus doit être formé aux techniques permettant de maîtriser avec le minimum de force les individus agressifs.
67. 1. Le personnel des autres services de maintien de l’ordre ne doit intervenir sur des détenus à l’intérieur des prisons que dans des circonstances exceptionnelles.
2. Les autorités pénitentiaires et le service de maintien de l’ordre concerné doivent auparavant conclure un accord formel, à moins que ces relations ne soient déjà régies par le droit interne.
3. Ledit accord doit stipuler :
a. les circonstances dans lesquelles les membres d’autres services de maintien de l’ordre peuvent entrer dans une prison pour résoudre une situation conflictuelle ;
b. l’autorité dont dispose le service de maintien de l’ordre concerné lorsqu’il est dans la prison et ses relations avec le directeur de l’établissement ;
c. les divers types de recours à la force que les membres de ce service peuvent appliquer ;
d. les circonstances dans lesquelles chaque type de recours à la force est envisageable ;
e. le niveau d’autorité requis pour décider d’un recours à la force ;
f. les rapports à rédiger après chaque recours à la force.
Moyens de contrainte
68. 1. L’emploi de chaînes et de fers doit être prohibé.
2. Il doit être interdit d’utiliser des menottes, camisoles de force et autres entraves sauf :
a. au besoin, par mesure de précaution contre une évasion pendant un transfèrement, pourvu qu’elles soient enlevées dès que le détenu comparaît devant une autorité judiciaire ou administrative, à moins que ladite autorité en décide autrement ;
b. sur ordre du directeur, lorsque les autres méthodes de contrôle ont échoué, afin d’empêcher un détenu de se blesser, de blesser des tiers ou de provoquer de sérieux dommages matériels, à condition que le directeur prévienne immédiatement le médecin et signale les faits aux autorités pénitentiaires supérieures.
3. Les moyens de contrainte ne doivent pas être appliqués plus longtemps qu’il est strictement nécessaire.
4. Les modalités d’utilisation des moyens de contrainte doivent être précisées par le droit interne.
Armes
69. 1. Sauf urgence opérationnelle, le personnel pénitentiaire ne doit jamais porter d’armes létales dans le périmètre de la prison.
2. Le port visible d’autres armes, y compris des matraques, par des personnes en contact avec des détenus doit être interdit dans le périmètre de la prison sauf si celles-ci sont nécessaires pour la sécurité et la sûreté lors d’un incident particulier.
3. Aucun membre du personnel ne reçoit d’arme sans avoir été formé à son maniement.
Requêtes et plaintes
70. 1. Les détenus doivent avoir l’occasion de présenter des requêtes et des plaintes individuelles ou collectives au directeur de la prison ou à toute autre autorité compétente.
2. Si une médiation semble appropriée, elle devrait être envisagée en premier lieu.
3. En cas de rejet de sa requête ou de sa plainte, les motifs de ce rejet doivent être communiqués au détenu concerné et ce dernier doit pouvoir introduire un recours devant une autorité indépendante.
4 Les détenus ne doivent pas être punis pour avoir présenté une requête ou avoir introduit une plainte.
5. L’autorité compétente doit tenir compte de toute plainte écrite émanant de la famille d’un détenu lorsque ladite plainte fait état de violations des droits de l’intéressé.
6. Aucune plainte par le représentant juridique ou par une organisation défendant le bien-être de la population pénitentiaire ne peut être déposée au nom d’un détenu si l’intéressé s’y oppose.
7. Les détenus doivent avoir le droit de solliciter un avis juridique sur les procédures de plainte et d’appel internes, ainsi que les services d’un avocat lorsque l’intérêt de la justice l’exige.
Partie V Direction et personnel
La prison en tant que service public
71. Les prisons doivent être placées sous la responsabilité des autorités publiques et être séparées des services de l’armée, de police et d’enquête pénale.
72. 1. Les prisons doivent être gérées dans un cadre éthique soulignant l’obligation de traiter tous les détenus avec humanité et de respecter la dignité inhérente à tout être humain.
2. Le personnel doit avoir une idée claire du but poursuivi par le système pénitentiaire. La direction doit montrer la voie à suivre pour atteindre efficacement ce but.
3. Les devoirs du personnel excèdent ceux de simples gardiens et doivent tenir compte de la nécessité de faciliter la réinsertion des détenus dans la société à la fin de leur peine, par le biais d’un programme positif de prise en charge et d’assistance.
4. Le personnel doit exercer son travail en respectant des normes professionnelles et personnelles élevées.
73. Les autorités pénitentiaires doivent accorder une grande importance à l’observation des règles applicables au personnel.
74. La gestion des relations entre le personnel en contact direct avec les détenus et ces derniers doit faire l’objet d’une attention particulière.
75. Le personnel doit en toute circonstance se comporter et accomplir ses tâches de telle manière que son exemple exerce une influence positive sur les détenus et suscite leur respect.
Sélection du personnel pénitentiaire
76. Le personnel est soigneusement sélectionné, convenablement formé - à la fois dans le cadre de son instruction initiale et de sa formation continue - rémunéré comme une main-d’œuvre spécialisée et doté d’un statut susceptible de lui assurer le respect de la société civile.
77. Lors de la sélection de nouveaux membres du personnel, les autorités pénitentiaires doivent souligner le besoin d’intégrité, de qualités humaines et de compétences professionnelles des candidats, ainsi que les aptitudes requises pour effectuer le travail complexe qui les attend.
78. Les membres du personnel pénitentiaire professionnel doivent normalement être employés à titre permanent en qualité d’agents de la fonction publique et bénéficier, en conséquence, d’une sécurité de l’emploi ne dépendant que de leur bonne conduite, de leur efficacité, de leur aptitude physique, de leur santé mentale et de leur niveau d’instruction.
79. 1. La rémunération doit être suffisante pour permettre de recruter et de conserver un personnel compétent.
2. Les avantages sociaux et les conditions d’emploi doivent être déterminés en tenant compte de la nature astreignante de tout travail effectué dans le cadre d’un service de maintien de l’ordre.
80. Chaque fois qu’il est nécessaire d’employer du personnel à temps partiel, ces critères doivent être appliqués dans la mesure où ils sont pertinents.
Formation du personnel pénitentiaire
81. 1. Avant d’entrer en fonctions, le personnel doit suivre un cours de formation générale et spéciale, et réussir des épreuves théoriques et pratiques.
2. L’administration doit faire en sorte que, tout au long de sa carrière, le personnel entretienne et améliore ses connaissances et ses compétences professionnelles en suivant des cours de formation continue et de perfectionnement organisés à des intervalles appropriés.
3. Le personnel appelé à travailler avec des groupes spécifiques de détenus - ressortissants étrangers, femmes, mineurs, malades mentaux, etc. - doit recevoir une formation particulière adaptée à ses tâches spécialisées.
4. La formation de tous les membres du personnel doit comprendre l’étude des instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’homme, notamment la Convention européenne des Droits de l’Homme et la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ainsi que l’application des Règles pénitentiaires européennes.
Système de gestion de la prison
82. Le personnel doit être sélectionné et nommé sur une base égalitaire et sans discrimination aucune fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.
83. Les autorités pénitentiaires doivent promouvoir des méthodes d’organisation et des systèmes de gestion propres :
a. à assurer une administration des prisons conforme à des normes élevées respectant les instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’homme ;
b. à faciliter une bonne communication entre les prisons et les diverses catégories de personnel d’une même prison et la bonne coordination de tous les services - internes et externes à la prison - qui assurent des prestations destinées aux détenus, notamment en ce qui concerne leur prise en charge et leur réinsertion.
84. 1. Chaque prison doit disposer d’un directeur qualifié sur le plan tant de sa personnalité, que de ses compétences administratives, de sa formation et de son expérience.
2. Les directeurs doivent être nommés à plein temps et se consacrer exclusivement à leurs devoirs officiels.
3. L’administration pénitentiaire doit s’assurer que chaque prison est, à tout moment, placée sous l’entière responsabilité du directeur, du directeur adjoint ou d’un fonctionnaire en charge.
4. Lorsqu’un directeur est responsable de plusieurs prisons, chacun des établissements concernés doit, en plus, avoir à sa tête un fonctionnaire responsable.
85. Les hommes et les femmes doivent être représentés de manière équilibrée au sein du personnel pénitentiaire.
86. Des dispositions doivent être prises afin que la direction consulte le personnel à titre collectif concernant les sujets d’ordre général et notamment les conditions de travail.
87. 1. Des dispositions doivent être prises afin d’encourager, dans toute la mesure du possible, une bonne communication entre la direction, les autres membres du personnel, les services extérieurs et les détenus.
2. Le directeur, son adjoint et la majorité des autres membres du personnel de la prison doivent pouvoir parler la langue de la plupart des détenus, ou une langue comprise par la majorité d’entre eux.
88. Dans les pays comptant des prisons gérées par des sociétés privées, ces établissements doivent appliquer intégralement les Règles pénitentiaires européennes.
Personnel spécialisé
89. 1. Le personnel doit comprendre, dans toute la mesure du possible, un nombre suffisant de spécialistes tels que psychiatres, psychologues, travailleurs sociaux, enseignants, instructeurs techniques, professeurs ou moniteurs d’éducation physique et sportive.
2. Des auxiliaires à temps partiel et des bénévoles compétents doivent être encouragés à contribuer, dans toute la mesure du possible, aux activités avec les détenus.
Sensibilisation du public
90. 1. Les autorités pénitentiaires doivent informer continuellement le public du rôle joué par le système pénitentiaire et du travail accompli par son personnel, de manière à mieux faire comprendre l’importance de sa contribution à la société.
2. Les autorités pénitentiaires devraient encourager les membres de la société civile à intervenir volontairement dans les prisons, lorsque cela est approprié.
Recherche et évaluation
91. Les autorités pénitentiaires doivent soutenir un programme de recherche et d’évaluation portant sur le but de la prison, son rôle dans une société démocratique et la mesure dans laquelle le système pénitentiaire remplit sa mission.
Partie VI Inspection et contrôle
Inspection gouvernementale
92. Les prisons doivent être inspectées régulièrement par un organisme gouvernemental, de manière à vérifier si elles sont gérées conformément aux normes juridiques nationales et internationales, et aux dispositions des présentes Règles.
Contrôle indépendant
93. 1. Les conditions de détention et la manière dont les détenus sont traités doivent être contrôlées par un ou des organes indépendants, dont les conclusions doivent être rendues publiques.
2. Ces organes de contrôle indépendants doivent être encouragés à coopérer avec les organismes internationaux légalement habilités à visiter les prisons.
Partie VII Prévenus
Statut des prévenus
94. 1. Dans les présentes Règles, le terme « prévenus » désigne des détenus qui ont été placés en détention provisoire par une autorité judiciaire avant leur jugement ou leur condamnation.
2. Tout Etat est en outre libre de considérer comme prévenu un détenu ayant été reconnu coupable et condamné à une peine d’emprisonnement, mais dont les recours en appel n’ont pas encore été définitivement rejetés.
Approche applicable aux prévenus
95. 1. Le régime carcéral des prévenus ne doit pas être influencé par la possibilité que les intéressés soient un jour reconnus coupables d’une infraction pénale.
2. Les Règles répertoriées dans cette partie énoncent des garanties supplémentaires au profit des prévenus.
3. Dans leurs rapports avec les prévenus, les autorités doivent être guidées par les Règles applicables à l’ensemble des détenus et permettre aux prévenus de participer aux activités prévues par lesdites Règles.
Locaux de détention
96. Autant que possible, les prévenus doivent avoir le choix de disposer d’une cellule individuelle, sauf s’il est considéré comme préférable qu’ils cohabitent avec d’autres prévenus ou si un tribunal a ordonné des conditions spécifiques d’hébergement.
Vêtements
97. 1. Les prévenus doivent se voir offrir la possibilité de porter leurs vêtements personnels si ceux-ci conviennent à la vie carcérale.
2. Les prévenus ne possédant pas de vêtements adéquats doivent recevoir des vêtements différents de l’uniforme éventuellement porté par les détenus condamnés.
Conseils juridiques
98. 1. Les prévenus doivent être explicitement informés de leur droit de solliciter des conseils juridiques.
2. Les prévenus accusés d’une infraction pénale doivent se voir fournir toutes les facilités nécessaires pour préparer leur défense et rencontrer leur avocat.
Contacts avec le monde extérieur
99. A moins qu’une autorité judiciaire n’ait, dans un cas individuel, prononcé une interdiction spécifique pour une période donnée, les prévenus :
a. doivent pouvoir recevoir des visites et être autorisés à communiquer avec leur famille et d’autres personnes dans les mêmes conditions que les détenus condamnés ;
b. peuvent recevoir des visites supplémentaires et aussi accéder plus facilement aux autres
formes de communication ; et
c. doivent avoir accès aux livres, journaux et autres moyens d’information.
Travail
100. 1. Les prévenus doivent se voir offrir la possibilité de travailler, mais sans y être obligés.
2. Lorsqu’un prévenu choisit de travailler, toutes les dispositions de la Règle 26 - y compris celles relatives à la rémunération - doivent s’appliquer.
Accès au régime des détenus condamnés
101. Si un prévenu demande à suivre le régime des détenus condamnés, les autorités pénitentiaires doivent satisfaire sa demande, dans la mesure du possible.
Partie VIII Objectif du régime des détenus condamnés
102. 1. Au-delà des règles applicables à l’ensemble des détenus, le régime des détenus condamnés doit être conçu pour leur permettre de mener une vie responsable et exempte de crime.
2. La privation de liberté constituant une punition en soi, le régime des détenus condamnés ne doit pas aggraver les souffrances inhérentes à l’emprisonnement.
Application du régime des détenus condamnés
103. 1. Le régime des détenus condamnés doit commencer aussitôt qu’une personne a été admise en prison avec le statut de détenu condamné, à moins qu’il n’ait déjà été entamé avant.
2. Dès que possible après l’admission, un rapport complet doit être rédigé sur le détenu condamné décrivant sa situation personnelle, les projets d’exécution de peine qui lui sont proposés et la stratégie de préparation à sa sortie.
3. Les détenus condamnés doivent être encouragés à participer à l’élaboration de leur propre projet d’exécution de peine.
4. Ledit projet doit prévoir dans la mesure du possible :
a. un travail,
b. un enseignement,
c. d’autres activités, et
d. une préparation à la libération.
5. Le régime des détenus condamnés peut aussi inclure un travail social, ainsi que l’intervention de médecins et de psychologues.
6. Un système de congé pénitentiaire doit faire partie intégrante du régime des détenus condamnés.
7. Les détenus qui le désirent peuvent participer à un programme de justice restauratrice et réparer les infractions qu’ils ont commises.
8. Une attention particulière doit être apportée au projet d’exécution de peine et au régime des détenus condamnés à un emprisonnement à vie ou de longue durée.
Aspects organisationnels de l’emprisonnement des détenus condamnés
104. 1. Dans la mesure du possible et sous réserve des exigences de la Règle 17, une répartition des différentes catégories de détenus entre diverses prisons ou des parties distinctes d’une même prison doit être effectuée pour faciliter la gestion des différents régimes.
2. Des procédures doivent être prévues pour établir et réviser régulièrement les projets individuels des détenus après examen des dossiers pertinents et consultation approfondie du personnel concerné et, dans la mesure du possible, participation des détenus concernés.
3. Chaque dossier doit inclure les rapports du personnel directement responsable du détenu en cause.
Travail des détenus condamnés
105. 1. Un programme systématique de travail doit contribuer à atteindre les objectifs poursuivis par le régime des détenus condamnés.
2. Les détenus condamnés n’ayant pas atteint l’âge normal de la retraite peuvent être soumis à l’obligation de travailler, compte tenu de leur aptitude physique et mentale telle qu’elle a été déterminée par le médecin.
3. Lorsque des détenus condamnés sont soumis à une obligation de travailler, les conditions de travail doivent être conformes aux normes et aux contrôles appliqués à l’extérieur.
4. Lorsque des détenus condamnés participent à des programmes éducatifs ou autres pendant les heures de travail, dans le cadre de leur régime planifié, ils doivent être rémunérés comme s’ils travaillaient.
5. Lorsque des détenus condamnés travaillent, une part de leur rémunération ou de leurs économies peut être affectée à la réparation des dommages qu’ils ont occasionnés, si un tribunal l’a ordonné ou si le détenu y consent.
Education des détenus condamnés
106. 1. Un programme éducatif systématique, comprenant l’entretien des acquis et visant à améliorer le niveau global d’instruction des détenus, ainsi que leurs capacités à mener ensuite une vie responsable et exempte de crime doit constituer une partie essentielle du régime des détenus condamnés.
2. Tous les détenus condamnés doivent être encouragés à participer aux programmes d’éducation et de formation.
3. Les programmes éducatifs des détenus condamnés doivent être adaptés à la durée prévue de leur séjour en prison.
Libération des détenus condamnés
107. 1. Les détenus condamnés doivent être aidés, au moment opportun et avant leur libération, par des procédures et des programmes spécialement conçus pour leur permettre de faire la transition entre la vie carcérale et une vie respectueuse du droit interne au sein de la collectivité.
2. Concernant plus spécialement les détenus condamnés à des peines de plus longue durée, des mesures doivent être prises pour leur assurer un retour progressif à la vie en milieu libre.
3. Ce but peut être atteint grâce à un programme de préparation à la libération, ou à une libération conditionnelle sous contrôle, assortie d’une assistance sociale efficace.
4. Les autorités pénitentiaires doivent travailler en étroite coopération avec les services sociaux et les organismes qui accompagnent et aident les détenus libérés à retrouver une place dans la société, en particulier en renouant avec la vie familiale et en trouvant un travail.
5. Les représentants de ces services ou organismes sociaux doivent pouvoir se rendre dans la prison autant que nécessaire et s’entretenir avec les détenus afin de les aider à préparer leur libération et à planifier leur assistance postpénale.
Partie IX Mise à jour des Règles
108. Les Règles pénitentiaires européennes doivent être mises à jour régulièrement.
Recommandation R(2006)2 sur les règles pénitentiaires - motifs