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(2004-05-12) Décision du Conseil d’Etat

Mise en ligne : 10 avril 2007

Texte de l'article :

Sur le rapport de la 2ème sous-section de la section du Contentieux
N° 261826 - 262025
Séance du 30 avril 2004
Lecture du 12 mai 2004
M. HAKKAR 

 Texte intégral de la décision

 Vu 1°/, sous le n° 261826, la requête, enregistrée le 17 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par M. Abdelhamid HAKKAR demandant au Conseil d’Etat d’annuler l’ordonnance du 6 novembre 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a rejeté, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, sa demande tendant, d’une part, à ce que la décision du 27 août 2003, par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer une carte nationale d’identité, soit annulée et, d’autre part, à ce qu’il soit enjoint au préfet du Doubs de lui délivrer une telle carte dans un délai de sept jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

Vu 2°/, sous le n° 262025, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 24 novembre 2003, présentée pour M. Abdelhamid HAKKAR demandant au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance du 6 novembre 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a rejeté, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, sa demande tendant, d’une part, à ce que la décision du 27 août 2003, par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer une carte nationale d’identité, soit annulée et, d’autre part, à ce qu’il soit enjoint au préfet du Doubs de lui délivrer une telle carte dans un délai de sept jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

2°) d’enjoindre au préfet du Doubs, à titre principal, de lui délivrer une carte nationale d’identité dans un délai de sept jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de sept jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 modifié, instituant la carte nationale d’identité ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l’aide juridique ;

Vu le décret n° 91 ?1266 du 19 décembre 1991 modifié, portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Chadelat, Conseiller d’Etat,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. HAKKAR,

- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de M. HAKKAR sont dirigées contre la même ordonnance et présentent à juger les mêmes questions ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : "Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures" ; qu’aux termes de l’article L. 522-3 du même code : "Lorsque la demande ne présente pas de caractère d’urgence ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu’il y ait lieu de faire application des deux premiers alinéas de l’article L. 522-1" ;

Considérant, d’autre part, qu’aux termes du premier alinéa de l’article 7 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l’aide juridique : "L’aide juridictionnelle est accordée à la personne dont l’action n’apparaît pas manifestement irrecevable ou dénuée de fondement" ; que, selon les articles 12 et 20 de la même loi, l’admission à l’aide juridictionnelle est prononcée par un bureau d’aide juridictionnelle ou, en cas d’urgence et à titre provisoire, par le président de ce bureau, par la juridiction compétente ou par son président ; qu’enfin, aux termes de l’article 33 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique : "La demande d’aide juridictionnelle... contient les indications suivantes : (...) - l’objet de la demande en justice, accompagné d’un exposé succinct de ses motifs ; / - la description sommaire du différend existant (...)" ;

Considérant que les dispositions précitées de l’article 7 de la loi du 10 juillet 1991 ont pour objet d’éviter que soient mises à la charge de l’Etat les dépenses afférentes aux actions qui, de manière manifeste, apparaissent dépourvues de toute chance de succès ; que, pour apprécier si les conditions prévues par ces dispositions sont remplies, l’autorité saisie se livre, au vu des seules indications figurant dans la demande d’aide juridictionnelle, à un examen nécessairement sommaire des éléments de l’espèce ; que la décision d’administration judiciaire qu’elle prend au terme de cet examen a pour seul objet d’admettre ou non le requérant au bénéfice de l’aide juridictionnelle ;

Considérant qu’eu égard à la nature de l’office ainsi attribué au magistrat appelé à statuer sur une demande d’aide juridictionnelle - et sous réserve du cas où il apparaîtrait qu’allant au-delà de ce qu’implique nécessairement cet office, il aurait préjugé l’issue du litige - la circonstance que le même magistrat se trouve ultérieurement amené à se prononcer sur la requête pour la présentation de laquelle l’aide juridictionnelle avait été sollicitée est, par elle même, sans incidence sur la régularité de la décision juridictionnelle statuant sur cette requête ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. HAKKAR a demandé, le 4 novembre 2003, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, qu’il soit enjoint au préfet du Doubs de lui délivrer une carte nationale d’identité ; qu’il a sollicité, le même jour, le bénéfice de l’aide juridictionnelle ; que, statuant en urgence, le président du tribunal administratif a rejeté la demande d’aide juridictionnelle, le 5 novembre 2003, au motif que la demande en référé était dénuée de fondement ; que, par l’ordonnance attaquée du 6 novembre 2003, le même magistrat, statuant en qualité de juge des référés, a rejeté la demande en référé de M. HAKKAR par application des dispositions de l’article L. 522-3 du code de justice administrative ;

Considérant qu’en rejetant ainsi la demande en référé de M. HAKKAR alors même qu’il avait précédemment refusé à ce dernier le bénéfice de l’aide juridictionnelle, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon ne s’est pas prononcé dans des conditions irrégulières au regard des règles relatives à l’impartialité des juridictions ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. HAKKAR n’est pas fondé à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de M. HAKKAR, demande au titre des frais qu’aurait exposés son client s’il n’avait pas bénéficié de l’aide juridictionnelle ;

D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes de M. HAKKAR sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Abdelhamid HAKKAR, au garde des sceaux, ministre de la justice, et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. 

Source : Conseil d’Etat

Lire l’analyse
54 - Procédure
54-06 - Jugements
54-06-05 - Frais et dépens
54-06-05-09 - Aide judiciaire
Président de la juridiction statuant sur une demande en cas d’urgence et à titre provisoire (art. 12 et 20 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée) - Président se prononçant ensuite sur la requête pour la présentation de laquelle l’aide juridictionnelle avait été sollicitée - Irrégularité de la décision juridictionnelle statuant sur cette requête - Absence.
Eu égard à la nature de l’office attribué au magistrat appelé à statuer, en application des articles 7, 12 et 20 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée, sur une demande d’aide juridictionnelle - et sous réserve du cas où il apparaîtrait qu’allant au-delà de ce qu’implique nécessairement cet office, il aurait préjugé l’issue du litige - la circonstance que le même magistrat se trouve ultérieurement amené à se prononcer sur la requête pour la présentation de laquelle l’aide juridictionnelle avait été sollicitée est, par elle même sans incidence sur la régularité de la décision juridictionnelle statuant sur cette requête (M. Hakkar, Section, 261826, 262025, 30 avril 2004, A, M. Labetoulle, pdt., Mme Chadelat, rapp., Mme de Silva, c. du g.).