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Date : 23-01-2009

(2009) Témoignage... de Fleury à Moulins Yzeure

Mise en ligne : 24 janvier 2009

Texte de l'article :

Témoignage... de Fleury à Moulin Yzeure
Sylvie et Christophe.

L’année dernière après le jugement de Christophe, j’ai vécu une période très difficile. Il venait de prendre 15 ans pour tentative d’évasion qui venaient venait s’ajouter aux 38 auxquels il avait été condamné quelques années plus tôt.

Il était en transit à la prison de Fleury depuis plusieurs mois. Il devait retourner à la centrale de Saint Maur d’où il venait après son jugement. Il en est ainsi pour ceux qui sont condamnés à de lourdes peines. Le problème c’est que son transit s’éternisait.

J’étais enceinte de huit mois d’un bébé d’amour conçu à la centrale de Clairvaux. J’aime Christophe et je voulais un enfant de lui. Ce jour là il faisait une chaleur épouvantable. Devant la prison de Fleury je suis tombée dans un trou. Il y avait un chantier où rien n’était balisé. Ma belle mère voulait que je porte plainte. J’ai laissé glisser. Aujourd’hui je le regrette parce que de son côté l’Ap ne nous fait aucun cadeau.

Dans le parloir j’ai eu des bouffées de chaleur, j’avais du mal à respirer. D’un seul coup, les murs de la cabine se sont mis à tourner. je me suis sentie bizarre avec l’impression que ma vessie se vidait par petits jets. Je me suis rendue compte que je perdais les eaux. Christophe était paniqué et impuissant. Il a tapé dans la porte et le surveillant est arrivé de suite. Comme il est gardé de près ils ne sont jamais très loin.

Branle bas de combat. Pompiers. Ambulance. Hôpital en urgence.

La seule parole dont je me souvienne vraiment c’est celle de la surveillante du parloir qui était particulièrement gentille avec la famille lorsque nous venions au parloir.

Je vous avais dit de ne pas courir comme ça !

Le problème à Fleury c’est que l’on court tout le temps dans les longs couloirs. Quelques minutes de retard et on ne rentre pas.

J’ai attendu 10 jours à l’hôpital alors que dans mon ventre, la petite était en souffrance. Elle est née sans pleurs et sans cris. On me l’a posé sur le ventre inanimée. Le Samu est venu la chercher pour l’emmener en réanimation dans un autre hôpital. J’ai appelé ma belle mère et je lui ai dit ma fille était morte. Je pleurais et criais sur sa messagerie.

Christophe a été transféré entre temps à la centrale de Saint Maur. Sa mère a appelé la direction. Elle voulait lui expliquer elle même les difficultés de l’accouchement. Le directeur a donné deux cartes téléphoniques à Christophe pour qu’il nous rappelle. Alijah a aujourd’hui

Un an et je ne l’amène plus au parloir de la prison de Moulins où Christophe vient d’être a nouveau transféré sans raison valable, il y a deux mois. C’est un acte de contestation contre ces transferts abusifs, contre l’environnement délétère des parloirs de cette prison.

On ne peut pas d’un côté chanter les bienfaits de la réinsertion et de l’autre transférer des hommes qui viennent à peine d’entamer un projet de vie en tuant dans l’œuf toute velléité de réinsertion. On ne peut pas non plus chanter les bienfaits du maintien des liens familiaux et proposer deux mètres carrés à peine, sans fenêtre, pour y amener des enfants qui devront y rester des heures, dans les bras de leurs parents.

A Moulins Yzeure ma fille a failli avaler des cailloux provenant du sol bétonné, la seule fois où je l’ai posé par terre, parce que je n’en pouvais plus de la tenir dans mes bras et ça, c’est inacceptable.

Sylvie et Alijah piciotti-Khider