Publié le samedi 2 juin 2007 | https://banpublic.org/etude-de-legislation-comparee-no/ LC 13 : La participation des citoyens aux décisions des tribunaux criminels (février 1996) NOTE DE SYNTHESE L’absence de procédure d’appel constitue l’un des principaux reproches formulés à l’encontre de la cour d’assises française. Pour y remédier, la réforme de la procédure criminelle actuellement envisagée se propose de : - remplacer les cours d’assises par des tribunaux criminels départementaux composés de plusieurs magistrats professionnels et de plusieurs citoyens assesseurs ; - créer un double degré de juridiction en matière criminelle, puisque les décisions des tribunaux criminels départementaux pourraient faire l’objet d’un appel devant les cours d’assises, qui continueraient à comporter trois magistrats et neuf jurés. Cette réforme amène naturellement à s’interroger sur la participation des citoyens aux décisions des tribunaux criminels dans les principaux pays étrangers et sur ses conséquences. Celle-ci ne constitue d’ailleurs pas une solution universellement adoptée. Ainsi, les Pays-Bas ont aboli le jury populaire en 1813 après l’occupation française, et le Japon l’a supprimé en 1943. Pour analyser les modalités et les conséquences de la participation des citoyens aux décisions des tribunaux criminels, on a retenu six pays. Outre les Etats-Unis où le droit à être jugé par un jury est inscrit dans la Constitution, il s’agit de l’Allemagne, de l’Angleterre et du Pays de Galles, de la Belgique, de l’Espagne et de l’Italie. Cet examen fait apparaître que la participation des citoyens aux décisions des tribunaux criminels : I - LES CITOYENS PARTICIPENT AUX DECISIONS DES TRIBUNAUX CRIMINELS SELON DES MODALITES TRES DIVERSES. 1) Seules les infractions pénales les plus graves sont jugées par des tribunaux comportant des citoyens. En revanche, la participation occasionnelle des citoyens à l’administration de la justice par le biais de jurés ou de citoyens-assesseurs n’est prévue, dans les six pays étudiés, que pour les infractions pénales les plus graves. En effet, tous ces pays ont établi une classification des infractions qui détermine la compétence des différentes juridictions pénales. Or, la définition des infractions les plus graves, c’est-à-dire de la compétence des tribunaux criminels où siègent des citoyens, varie d’un pays à l’autre. Ainsi, aux Etats-Unis, l’accusé a un droit constitutionnel à être jugé par un jury dès que la peine encourue dépasse six mois d’emprisonnement. En revanche, dans les pays européens, les citoyens interviennent pour le jugement d’infractions punies plus sévèrement. En Italie par exemple, le jury juge l’homicide sous toutes ses formes ainsi que, plus généralement, toutes les infractions punies d’une peine d’emprisonnement de plus de vingt-quatre ans. L’Espagne constitue un cas particulier. En effet, le jury populaire n’y a été institué que récemment : c’est une loi organique du 22 mai 1995, entrée en vigueur six mois plus tard, qui l’a créé. Dans une première phase, sa compétence est expressément limitée à certains crimes. La sélection a été réalisée de façon à exclure les affaires qui risquent d’être trop complexes. Les crimes pour lesquels le " tribunal du jury " n’a pas reçu compétence restent soumis au tribunal pénal auparavant compétent pour tous les crimes, l’" audience provinciale " exclusivement composée de magistrats professionnels. Toutefois, l’élargissement progressif des compétences du " tribunal du jury " est prévu. 2) Les modalités de la participation des citoyens aux décisions des tribunaux criminels diffèrent. Aux Etats-Unis, la composition des tribunaux criminels varie selon qu’il s’agit de tribunaux fédéraux ou de tribunaux d’Etats. Dans le premier cas, les douze jurés sont associés à un magistrat professionnel. Dans le second, le nombre de jurés varie entre six et douze selon les Etats et le juge, bien qu’il doive posséder une formation juridique, n’est pas un juge professionnel. b) Le rôle des jurés ou des citoyens-assesseurs n’est pas le même dans tous les pays. Celui-ci est alors lié, mais pas toujours de façon absolue, par le verdict du jury. En Angleterre et au Pays de Galles, la jurisprudence ne lui reconnaît qu’exceptionnellement la possibilité de demander au jury de réviser son verdict. En Espagne en revanche, le magistrat peut retourner au jury le procès-verbal des réponses aux questions qui lui sont posées si les différentes réponses sont contradictoires ou s’il constate un vice. De même aux Etats-Unis, le juge peut, s’il estime que les preuves sont manifestement insuffisantes, prendre la décision d’accquitter l’accusé bien que le jury ait rendu un verdict de culpabilité. En pratique, il n’exerce cette faculté que rarement. Dans ces trois pays, la peine est donc fixée par le seul magistrat. Aux Etats-Unis toutefois, le jury peut jouer un rôle dans la détermination de la peine, dans certains Etats lorsque l’accusé est susceptible d’être condamné à mort. Il peut alors recommander ou non la peine de mort. En Allemagne et en Italie, les magistrats et les juges citoyens ont les mêmes pouvoirs. Ils statuent donc ensemble sur la culpabilité puis sur la peine. Cependant, les magistrats professionnels tranchent seuls les questions de droit qui se posent pendant les débats. En Belgique, les jurés statuent sur la culpabilité puis se joignent aux magistrats professionnels pour déterminer la peine. Les magistrats peuvent avoir à participer à la décision sur la culpabilité avec le jury si celui-ci s’est prononcé à une trop faible majorité. Quelque soit l’auteur de la décision sur la culpabilité (jury seul ou jury et magistrats), le jury et les magistrats déterminent ensemble la peine. c) Les jurés ne motivent pas toujours leurs décisions. De même, la récente loi espagnole prévoit la motivation des décisions du jury. En revanche, en Angleterre et au Pays de Galles, en Belgique et aux Etats-Unis, le jury n’a pas à motiver son jugement, la culpabilité devant être établie selon les pays, " au-delà de tout doute raisonnable " ou d’après " l’intime conviction ". II- LE PLUS SOUVENT, LES DECISIONS DES TRIBUNAUX CRIMINELS NE SONT PAS SUSCEPTIBLES D’APPEL. 1) L’Espagne et l’Italie ont créé un double degré de juridiction en matière criminelle. Toutefois, l’appel ne porte que sur les décisions du président du " tribunal du jury ", le verdict du jury ayant préalablement fait l’objet d’un contrôle juridique de la part du magistrat. Par ailleurs, les crimes qui échappent à la compétence du " tribunal du jury " continuent à être jugés par l’" audience provinciale ", dont les décisions ne sont pas susceptibles d’appel. En revanche, en Italie, les appels des jugements des cours d’assises sont portés devant les cours d’assises d’appel. Elles sont constituées, comme les cours d’assises, de deux magistrats et de six jurés. Cependant, les jurés des cours d’assises d’appel sont tirés au sort sur une liste spécifique : ils doivent, contrairement aux jurés de cours d’assises, être titulaires d’un diplôme de fin d’études secondaires. 2) Les autres pays limitent beaucoup les recours en matière criminelle. b) En Angleterre et au Pays de Galles, comme aux Etats-Unis, le principe du double degré de juridiction n’est pas admis mais la loi organise certains recours. Actuellement, les recours qui ne se fondent pas exclusivement sur une question de droit doivent être autorisés, soit par le tribunal qui a émis le jugement, soit par la juridiction de recours. Ceci explique le faible nombre des recours. Dans la pratique, il est beaucoup plus facile de fonder un recours sur une question de procédure ou sur la peine, qui relèvent de la compétence du juge, que sur le verdict du jury. Aux Etats-Unis, les voies de recours, assez nombreuses, sont limitées aux seuls points de droit. Le juge peut ordonner un nouveau procès " dans l’intérêt de la justice " si des erreurs de procédure doivent être corrigées. Quant aux cours supérieures, elles ne peuvent être saisies que pour sanctionner des erreurs de droit. ALLEMAGNE Les juridictions pénales appartiennent à la juridiction " ordinaire " (par opposition aux juridictions administrative, financière, sociale et du travail. Les tribunaux des quatre niveaux qui constituent cette dernière (Amtsgerichte, Landgerichte, Oberlandesgerichte et Bundesgerichtshof : voir annexe n° 1) ont donc à la fois la qualité de juridiction civile et de juridiction pénale. I - LES JURIDICTIONS PENALES DE PREMIERE INSTANCE Il s’agit des Amtsgerichte et des Landgerichte. Les affaires leur sont réparties compte tenu de deux critères : la nature de l’infraction et la gravité de la peine encourue. 1) Les Amtsgerichte Le ressort territorial des Amsgerichte varie mais il est généralement inférieur au Kreis. 2) Les Landgerichte Le ressort territorial des Landgerichte englobe généralement celui de plusieurs Amtsgerichte. Dans l’exercice de cette compétence, le Landgericht est composé de trois magistrats et de deux citoyens. On le dénomme alors Schwurgericht. Le Schwurgericht peut être assimilé à la cour d’assises française. II - LE SCHWURGERICHT Composition Jusqu’en 1924, les deux citoyens ne participaient pas à la délibération sur la peine. III - LES VOIES DE RECOURS OUVERTES AUX CONDAMNES 1) L’appel En revanche, les décisions de l’Amtsgericht peuvent être portées en appel devant le Landgericht. 2) La cassation Par loi, on entend toute norme juridique quelle que soit sa source. La violation peut résider dans un vice de procédure grave (composition du tribunal par exemple) ou dans l’existence d’un rapport de causalité entre ladite violation et le contenu du jugement. Pour justifier une demande en révision, il suffit de prouver que le juge n’a pas eu recours à tous les moyens de preuve disponibles, ce qui a peut-être conduit à un jugement erroné. Les tribunaux compétents sont les 24 Oberlandesgerichte et la Cour fédérale de justice (Bundesgerichtshof). Les Oberlandesgerichte, composés uniquement de juges professionnels, ont pour principale compétence de se prononcer sur la régularité juridique des décisions rendues en appel par les Landgerichte, et de leurs décisions rendues en première instance lorsque le pourvoi en cassation est fondé sur la violation d’une loi du Land. La Cour fédérale de justice juge exclusivement en droit et non en fait. Elle est essentiellement compétente pour les décisions des Oberlandesgerichte ainsi que celles des Landgerichte lorsque le pourvoi en cassation est fondé sur la violation d’une loi fédérale. ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES Les juridictions pénales de base sont les magistrates’ courts, qui sont également compétentes en matière civile. Les autres juridictions pénales constituent un ordre spécifique (voir annexe n° 2). I - LES JURIDICTIONS PENALES DE PREMIERE INSTANCE En première instance, une infraction pénale est soumise, selon sa gravité, à une magistrates’ court ou à la Crown Court. En effet, les infractions pénales sont réparties en trois catégories : - les infractions mineures passibles au maximum à la fois d’un emprisonnement ne pouvant excéder six mois et d’une amende d’au moins 5 000 , sont jugées selon une procédure rapide par les magistrates’ courts ; - celles qui donnent lieu à une procédure sur acte d’accusation (meurtres, homicides volontaires, viols et vols qualifiés) ne sont jugées que par la Crown Court, où la justice est rendue par un juge siégeant avec un jury ; - les infractions " relevant d’une juridiction ou d’une autre " (cambriolages, blessures volontaires) peuvent être jugées par une magistrates’ court ou par la Crown Court selon le souhait du défendeur. Aucun texte ne classe les différentes infractions par catégorie. Les infractions mineures ont toutes été créées par une loi. Les infractions jugées par la Crown Court sont, d’une part, celles qu’une loi qualifie d’" indictable " et, d’autre part, celles qui ont été crées par la jurisprudence. Les infractions " relevant d’une juridiction ou d’une autre " peuvent être subdivisées en deux groupes : celles qu’une loi a expressément qualifiées et celles qui figurent à l’annexe 1 de la loi sur les magistrates’ courts. Les magistrates’ courts réunissent de deux à sept (le plus souvent trois) magistrates qui sont surtout des juges non professionnels. La Crown Court constitue donc l’équivalent de la Cour d’assises française. II - LA CROWN COURT La Crown Court, bien qu’unique, tient des sessions dans quelque quatre-vingt-dix centres. Composition Les jurés sont tirés au sort à partir des listes électorales. Si l’accusé plaide coupable, la Crown Court siège avec un juge unique. Ils peuvent poser des questions par l’intermédiaire du président et prendre des notes. Après l’audition des témoins à charge, le jury peut décider qu’en l’absence de charge suffisante, le procès s’arrête. Faute d’information, le jury exerce rarement cette faculté. Pendant leur délibéré, les jurés peuvent questionner le magistrat. La peine est fixée par le magistrat professionnel, qui doit accepter le verdict du jury. La jurisprudence est très restrictive sur les cas où le juge peut demander au jury de réviser son verdict. Le principe du double degré de juridiction n’est pas admis en tant que tel. Toutefois, la loi organise certains recours dans certaines circonstances. En outre, le second jugement ne constitue pas du tout une répétition de l’audience en première instance. Les témoins ne sont généralement pas réentendus mais la transcription écrite de leur témoignage en première instance est utilisée. En effet, la possibilité qu’a la juridiction d’appel d’entendre un témoin qui n’a pas été entendu en première instance est peu mise en oeuvre. La loi prévoit que les décisions de première instance de la Crown Court puissent faire l’objet d’un recours devant la Criminal Division de la Court of Appeal, les décisions de la Crown Court rendues en appel faisant elles l’objet d’un recours devant la Divisional Court of the Queen’s Bench Division. De la Court of Appeal et de la Queens’s Bench Division, un second recours peut être formé devant la chambre des Lords. 1) La Criminal Division de la Court of Appeal Le recours peut porter sur la condamnation ou sur la peine, à moins que cette dernière ne soit fixée par la loi. Les conditions de recevabilité des recours, posées par le Criminal Appeal Act de 1968, expliquent leur caractère exceptionnel. a) Le recours sur la condamnation La section 2 du Criminal Appeal Act de 1968 indique dans quelles circonstances le recours doit être autorisé par la Court of Appeal. Les critères de recevabilité sont les suivants : Dans tous les autres cas, le recours ne peut pas être autorisé. En 1992, le tiers des demandes de recours sur la condamnation a été accepté. Cette rédaction a été largement critiquée par la Commission royale sur la justice pénale [2], qui a remis son rapport au Parlement en juillet 1993. Le Criminal Appeal Act de 1995, adopté le 19 juillet 1995, mais dont la date d’entrée en vigueur n’est pas encore fixée, tient compte de ces remarques. A partir de l’entrée en vigueur de ce texte, tout recours, qu’il se fonde sur une question de droit ou de fait, devra être autorisé par la Crown Court ou par la Court of Appeal. De plus, il n’y aura plus qu’un critère de recevabilité des recours : le caractère dangereux de la condamnation. La Court of Appeal peut infirmer la décision de la Crown Court et donc acquitter la personne condamnée. Elle peut aussi demander que la Crown Court rende un nouveau jugement si elle estime que " l’intérêt de la justice l’exige ", même en l’absence de nouveaux éléments de preuve. Jusqu’en 1988, en effet, il fallait de nouveaux éléments de preuve pour ordonner un nouveau jugement. En pratique, la Court of Appeal répugne à infirmer les décisions d’un jury ou à ordonner un nouveau jugement quoiqu’elle utilise cette faculté, assez récente, de façon croissance comme en témoigne les chiffres ci-après : Nombre de jugements réordonnés par la Court of Appeal par Années b) Le recours sur la peine La Court of Appeal ne peut admettre ce type de recours que si elle est convaincue que la peine infligée est " déraisonnablement importante ". La Court of Appeal ne peut plus, depuis 1966, accroître la peine décidée par la Crown Court. * En cas de verdict de culpabilité, il est donc actuellement beaucoup plus facile de fonder un recours sur une question de procédure ou sur la peine, qui relèvent de la compétence exclusive du juge, que sur le verdict du jury. En revanche, un inculpé condamné par une magistrates’ court peut en toute circonstance faire appel auprès de la Crown Court, aussi bien sur la peine lorsqu’il a plaidé coupable, que sur la peine et sur la condamnation lorsqu’il a plaidé non coupable. Dans ce cas, la Crown Court siège avec un juge unique assisté de plusieurs magistrates. L’affaire est complètement rejugée et les témoins sont réentendus. 2) La Divisional Court de la Queen’s Bench Division 3) La Chambre des Lords L’accusation et l’accusé peuvent faire appel des décisions de la Court of Appeal’ s Criminal Division (et de la Divisional Court of the Queen’s Bench Division) devant la Chambre des Lords à condition que la première juridiction ou la Chambre des Lords elle-même autorise l’appel. Pour cela, il faut que l’affaire soulève un point de droit et présente un intérêt général. Dans l’exercice de ces fonctions judiciaires, seuls cinq Law Lords siègent en général, le quorum étant de trois. Ils peuvent exercer tous les pouvoirs dont jouit la Court of Appeal (confirmer ou infirmer le jugement précédent, ou renvoyer l’affaire à la cour qui les a saisis). BELGIQUE Au cours des dernières années, sa suppression a été envisagée, mais aucun projet de réforme des juridictions criminelles n’est en préparation. I - LES JURIDICTIONS PENALES DE PREMIERE INSTANCE Aux termes de l’article 98 de la Constitution, la cour d’assises est compétente pour " toutes matières criminelles et pour délits politiques et de la presse ". Par exception, la cour d’assises ne juge pas : Selon l’article 119 du code judiciaire, " la cour d’assises comprend un président et deux assesseurs ; elle siège avec l’assistance du jury. " La cour d’assises siège au chef-lieu de la province. II - LA COUR D’ASSISES Composition - Si plus de sept jurés se prononcent pour la culpabilité, les jurés et les juges délibèrent ensuite sur la peine. - Si le jury déclare l’accusé coupable à la majorité de sept voix, les trois juges se prononcent à leur tour sur la culpabilité. Au cas où ils ne se rallient pas (à la majorité) au verdict du jury, l’accusé est acquitté. Si le jury et la cour déclarent l’accusé coupable, ils délibèrent ensemble sur la peine. - Si six jurés se prononcent pour la culpabilité et six contre, l’accusé est acquitté. Motivation de la décision Le président peut demander au jury de rectifier son verdict si celui-ci est ambigu, obscur ou contradictoire. Si les juges sont unanimement convaincus que les jurés se sont trompés au fond, ils peuvent déclarer qu’il est sursis au jugement et renvoyer l’affaire à la session suivante pour qu’elle soit soumise à un nouveau jury. Cette disposition n’a jamais été appliquée. Pour la détermination de la peine, si l’unanimité n’est pas réunie après le premier vote, un second vote est organisé. Si l’unanimité moins une voix n’est pas obtenue après le second vote, un troisième vote est organisé. Cette opération est répétée jusqu’à obtention de la majorité absolue. III - LES VOIES DE RECOURS OUVERTES AUX CONDAMNES 1) L’appel En revanche, les décisions du tribunal de police et du tribunal correctionnel peuvent faire l’objet d’un appel respectivement auprès du tribunal correctionnel et de la Cour d’appel. 2) La cassation ESPAGNE La loi organique 5/1995 du 22 mai 1995, modifiée depuis lors, notamment à cause de l’entrée en vigueur du nouveau code pénal en novembre 1995, a créé le jury populaire, compétent en matière criminelle. Cette nouvelle institution, que l’Espagne avait connue auparavant, notamment pendant la seconde République, était déjà mentionnée par l’article 125 de la Constitution : " Les citoyens pourront (...) participer à l’administration de la justice par l’institution du jury, sous la forme et pour les procès à caractère pénal que la loi déterminera (...) " ainsi que par la loi organique sur le pouvoir judiciaire qui prévoyait la mise en place d’un " tribunal du jury " dans chaque province [4]. La loi 5/1995 n’est entrée en vigueur qu’à la fin du mois de novembre. Seules les dispositions concernant la mise en place des jurys ont été appliquées plus rapidement. I - LES JURIDICTIONS PENALES DE PREMIERE INSTANCE Il s’agit essentiellement du juge de paix, du juge d’instruction, du tribunal du jury et de l’audience provinciale qui se répartissent les affaires en fonction de leur gravité. Les autres juridictions pénales de première instance ont en effet des compétences très spécifiques. 1) Le juge de paix Le juge de paix est essentiellement compétent pour les infractions à l’ordre public et aux biens immobiliers punies au maximum d’une amende de 50 000 pesetas (c’est-à-dire 2 000 F) et d’un emprisonnement d’une durée de trente jours. 2) Le juge d’instruction - les infractions qui sont attribuées au juge de paix dans les communes où il n’y a pas de tribunal, - les infractions plus graves, mais dont la peine maximale est un emprisonnement d’au plus six ans, ou une amende, quelque soit son montant, ou une suspension du permis de conduire, quelle que soit sa durée. 3) Le tribunal du jury A l’intérieur de ces cinq catégories, la compétence du tribunal du jury est expressément limitée à certaines infractions. Il s’agit essentiellement : Dans son exposé des motifs, la loi de 1995 précise que l’on a choisi les infractions qui, a priori, ne sont pas trop complexes et dont les éléments juridiques sont susceptibles d’être compris par tous les citoyens. Cependant, elle n’exclut pas l’élargissement progressif de la compétence matérielle du tribunal du jury " au vu de l’expérience et de l’enracinement social de l’institution ". La compétence du tribunal du jury a en effet été délimitée de façon à ce qu’au départ le nombre des affaires qui lui sont soumises ne dépasse pas huit cents par an. Le tribunal du jury peut être assimilé à la cour d’assises française. 4) L’audience provinciale Depuis l’entrée en vigueur de la réforme, elle juge, parmi les infractions trop graves pour être soumises au juge d’instruction, seulement celles qui ne relèvent pas de la compétence du tribunal du jury. Il en va ainsi pour les rapts d’enfants, les attaques à main armée et les violences sexuelles par exemple. L’audience provinciale est composée de une ou plusieurs chambres réunissant chacune un président et au moins deux magistrats, c’est-à-dire des juges professionnels de niveau élevé. II - LE TRIBUNAL DU JURY Composition Les jurés sont tirés au sort à partir des listes électorales. Ils doivent savoir lire et écrire. Il peut prononcer la dissolution anticipée du jury, d’office ou sur demande de la défense, s’il estime qu’il n’y a pas de charge suffisante contre l’accusé. Le magistrat récapitule ensuite toute l’affaire par oral aux jurés en leur rappelant leurs fonctions. Pendant la délibération, les jurés peuvent obtenir des explications complémentaires du président. Les jurés expriment leur vote par ordre alphabétique. Leur porte-parole vote en dernier. La peine est décidée par le magistrat qui préside, en fonction du verdict du jury, si celui-ci lui semble juridiquement correct. Le magistrat peut retourner le procès-verbal au jury s’il constate un vice ou si les différentes réponses sont contradictoires. Cette procédure peut être répétée trois fois de suite avec le même jury, après quoi un nouveau jury doit être désigné. L’abstention, admise mais sanctionnée par une amende, est considérée comme favorable à l’accusé. III - LES VOIES DE RECOURS OUVERTES AUX CONDAMNES Dans son exposé des motifs, la loi qui institue le jury populaire insiste sur la nécessité du double degré de juridiction. 1) L’appel Le procès en appel est jugé par trois magistrats professionnels de niveau élevé appartenant à la chambre pénale du tribunal supérieur de justice de la communauté autonome. L’appel est possible contre le jugement final du président ainsi que contre les ordonnances qu’il a préalablement rendues pendant les débats et la délibération. La loi reconnaît cinq motifs d’appel : * En revanche, dans le cas des infractions qui continuent à être jugées par l’audience provinciale, aucun appel n’est possible. 2) La cassation ITALIE A l’exception de la cour d’assises et de la cour d’appel d’assises, les autres tribunaux de la juridiction " ordinaire " ont tous une double compétence, civile et pénale. I - LES JURIDICTIONS PENALES DE PREMIERE INSTANCE Il s’agit du préteur, du tribunal civil et pénal et de la cour d’assises 1) Le préteur 2) Le tribunal civil et pénal 3) La cour d’assises L’étendue de la juridiction d’une cour d’assises correspond le plus souvent à une région, mais plusieurs cours d’assises peuvent être instituées dans la même région. II - LA COUR D’ASSISES Composition 1) L’appel La composition de la cour d’assises d’appel est la même que celle de la cour d’appel : deux magistrats professionnels dont l’un préside, et six jurés. Les jurés sont choisis de la même façon que ceux de la cour d’assises mais ils sont tirés au sort sur une liste spécifique. En effet, pour être juré d’une cour d’assises d’appel, il faut au moins posséder un diplôme de fin d’études secondaires. La décision de la cour d’assises d’appel se limite aux points qui ont fait l’objet du recours. En appel, le procès se déroule exactement comme en première instance. Si le recours est uniquement formé par l’accusé, la cour d’assises d’appel ne peut pas prendre une décision qui lui soit plus défavorable que la décision de première instance. * Les jugements des préteurs et des tribunaux sont soumis en appel à la cour d’appel. Les décisions y sont prises par des chambres de trois magistrats professionnels. 2) La cassation ETATS-UNIS Les juridictions américaines ne sont pas divisées en ordres juridictionnels différents suivant les domaines du droit. En principe, les affaires civiles, pénales ou administratives sont tranchées par les mêmes tribunaux. En matière pénale, l’accusé a un droit constitutionnel d’être jugé par un jury, dès lors que la peine encourue dépasse six mois d’emprisonnement. I - LES JURIDICTIONS PENALES DE PREMIERE INSTANCE L’organisation judiciaire est fondée sur la coexistence d’un système de tribunaux d’Etats et de tribunaux fédéraux. 1) Les juridictions des Etats En première instance, chaque Etat s’est doté de tribunaux inférieurs (tribunaux de comtés, juridictions municipales, tribunaux de petite instance, de simple police...) et de Trial Courts, cours de juridiction générale (tribunaux d’Etats, de comtés, de districts...) qui se répartissent les affaires suivant leur importance. a) Les tribunaux inférieurs b) Les Trial Courts Ces cours sont compétentes pour juger les infractions plus graves que celles qui relèvent des tribunaux inférieurs. 2) Les juridictions fédérales Elles ont compétence générale pour les infractions fédérales et sont composées d’un juge professionnel, juriste de formation, assisté d’un jury de douze personnes. Les United States District Courts peuvent désigner des juges non professionnels, les United States Magistrates, afin de juger les infractions passibles de peines de prison inférieures à douze mois ou d’amendes inférieures à 1 000 dollars. Dans cette hypothèse, le procès a lieu en l’absence de jury, ce qui implique que l’accusé ait renoncé au droit constitutionnel d’être jugé par un jury. Les Trial Courts et les United States District Courts peuvent dont être assimilées aux cours d’assises françaises. II - LA TRIAL COURT ET LA UNITED STATES DISTRICT COURT Composition Au niveau fédéral, un juge professionnel assisté d’un jury de douze personnes choisies comme dans les Etats. Dans le système fédéral et dans la majorité des Etats, l’accusé peut renoncer au jury, mais seulement avec le consentement du juge et de la poursuite. Dans ce cas, le juge siège seul. Il en est de même lorsque l’accusé choisit de plaider coupable. Ils doivent écouter sans prendre de notes et ne peuvent poser de questions que par l’intermédiaire du juge. Pendant la durée du procès, les jurés doivent s’abstenir de lire, écouter ou regarder des informations relatives à l’affaire. Si un procès doit durer plus d’une journée, le jury est alors " séquestré " dans un hôtel. Cependant, lorsque la défense a déposé une requête en acquittement, le juge doit acquitter l’accusé s’il considère que les preuves sont insuffisantes. Ce type de requête peut être déposé à deux reprises lors des débats : Lorsque la requête est présentée après la discussion des preuves, le juge peut prendre sa décision sur le champ ou la réserver jusqu’après que le jury s’est retiré pour délibérer, ou après que le jury a rendu son verdict. Par ailleurs, en fin d’audience, le juge donne des instructions au jury afin de lui exposer tous les points de droit soulevés pendant l’audience. Dans le système fédéral et dans quelques rares Etats, le juge peut en outre effectuer, à l’adresse du jury, un commentaire des preuves, tout en lui indiquant de ne pas tenir compte de ce commentaire, le jury étant seul maître dans la détermination des faits. Ce commentaire consiste en un résumé et une analyse des preuves, permettant au juge d’insister sur les points les plus importants. Le juge doit cependant s’abstenir de prendre parti ou de faire des remarques préjudiciables à l’accusé. Ils doivent rester au secret pendant la durée de leurs délibérations. C’est le jury qui rend le verdict sur les faits. En cas de culpabilité, le jury précise le degré de culpabilité : meurtre, préméditation, circonstances atténuantes... Cependant, quel que soit le verdict du jury, l’accusé peut toujours être acquitté par le juge, si ce dernier estime que les preuves sont insuffisantes pour fonder le verdict de culpabilité. Lorsque les conclusions d’acquittement sont définitivement rejetées, le juge fixe une date pour l’audience de détermination de la peine, à laquelle le jury n’est pas associé. Dans certains Etats cependant, le jury joue un rôle dans la fixation de la peine pour les infractions passibles de la peine de mort. Le jury peut recommander la peine de mort ou " s’abstenir de recommander la clémence ". A la requête des parties au procès ou de son propre chef, le juge peut ordonner que les jurés soient individuellement interrogés pour vérifier que la majorité requise est réellement atteinte et qu’un juré n’a pas subi de pression des autres jurés. Lorsqu’aucun verdict ne peut être prononcé, à défaut d’accord de la majorité requise ou lorsqu’il apparaît que celle-ci n’est pas réellement atteinte, le juge peut renvoyer le jury à ses délibérations après l’avoir encouragé à parvenir à un accord. Si, malgré cette deuxième délibération, le jury est incapable de parvenir à prononcer un verdict, le juge annule le procès, un nouveau procès devant avoir lieu dans les mêmes conditions que le premier. Les voies de recours, bien qu’assez nombreuses, sont limitées aux seuls points de droit. En effet, le réexamen du fait et du droit n’est possible que pour les infractions bénignes, jugées par les tribunaux inférieurs au niveau local ou par les United States Magistrates au niveau fédéral. Parmi les voies de recours possibles pour les infractions les plus importantes, on distingue : 1) La demande d’un nouveau procès Comme les faits étayant la culpabilité ne sont pas remis en cause à l’occasion de ce recours, le juge statue seul sur la requête en l’absence de jury. S’il répond favorablement à la requête, le procès est annulé, la poursuite pouvant engager un nouveau procès sur les mêmes faits. 2) L’appeal a) Les recours contre les décisions des Trial Courts · Les cours d’appeal intermédiaires des Etats Il y en a environ cent cinquante réparties dans une trentaine d’Etats. Elles sont composées de trois à quinze juges siégeant collégialement souvent à trois juges. · Les cours suprêmes des Etats. Il en existe cinquante-cinq, composées de cinq à neuf juges siégeant collégialement. Elles reçoivent les recours contre les décisions des cours d’appeal intermédiaires s’il en existe et, dans le cas contraire, des Trial Courts. Si elles sont tenues de se saisir du premier recours, elles peuvent refuser d’examiner les recours contre les décisions des cours d’appeal intermédiaires. · La Cour suprême des Etats-Unis. Un accusé, condamné par une Trial Court peut, en sus de l’appeal, chercher à obtenir un réexamen direct de sa condamnation par la Cour suprême, s’il invoque la violation d’un droit fédéral. La Cour, qui est composée de neuf juges, n’est cependant pas tenue de statuer. Elle accepte généralement sa saisine lorsqu’une cour d’Etat a décidé sur un point de droit qu’elle-même n’a jamais examiné ou lorsqu’elle s’est écartée de sa jurisprudence. Jusqu’en 1988, il existait une autre procédure d’appeal devant la Cour suprême lorsqu’une cour d’Etat avait déclaré que la Constitution ou une loi de cet Etat l’emportait sur une disposition contraire d’une loi fédérale. Cette voie de recours a été abolie. b) Les recours contre des décisions des United States District Courts Au nombre de treize, elles comprennent de quatre à vingt-six juges siégeant généralement à trois. Elles sont obligatoirement saisies des recours contre des décisions des United States District Courts portant sur des points de droit. Elles sont également chargées d’examiner les recours portant sur la peine, lorsque celle-ci excède les limites des barèmes fédéraux. Elles constituent le plus souvent le seul recours au niveau fédéral. · La Cour suprême des Etats-Unis Comme pour les recours contre des décisions des tribunaux d’Etat, la Cour peut accepter de statuer sur une décision d’une United States Court of Appeal. Toutefois, la Cour rejette environ 95 % des requêtes qui lui sont soumises. 3) Les recours latéraux Par ailleurs, si elle invoque la violation de la Constitution ou d’un droit fédéral, le prisonnier peut s’adresser à la United States District Court. Sa décision est alors sujette au contrôle d’une " Court of appeal " fédérale et finalement de la Cour suprême des Etats-Unis. Ce type de recours s’est beaucoup développé depuis quelques années dans les Etats. Au niveau fédéral, les United States District Court reçoivent environ 9 000 demandes de " writ of habeas corpus " par an. Les writs ne sont cependant accordés que dans 5 % des cas. [1] La décision d’autoriser le recours, prise par un juge unique, peut à son tour faire l’objet d’un recours. Dans ce cas, la décision définitive est prise par trois juges [2] La Commission royale fut nommée le lendemain de la mise en liberté des six de Birmingham, antérieurement déclarés coupables de terrorisme. Dans ce cas, la condamnation, régulièrement obtenue, a été annulée non par voie d’appel, mais par l’intervention du ministre de l’intérieur. Depuis 1966, il jouit en effet du pouvoir de soumettre à nouveau à la Court of Appeal les affaires pour lesquelles des doutes continuent de subsister [3] Il y avait douze Law Lords au 1er janvier 1996 [4] Les seize communautés autonomes sont subdivisées en quarante-sept provinces, circonscriptions administratives de droit commun. Dans chaque communauté, il y a entre une et neuf provinces. |