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4 Les Réglementations

Publié le lundi 7 mai 2012 | https://banpublic.org/4-les-reglementations/

4. Les Réglementations
4.1 Le droit international protecteur des anciens détenus

La réglementation internationale semble protéger les anciens détenus, en veillant à ce que leur passé pénal ne soit pas un frein à leur réintégration dans la société.

a) Conseil de l’Europe

Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (1950)
Article 14 - Interdiction de discrimination - " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation."
Protocole n°12 à la CEDH (2000)
Article 1 - Interdiction générale de la discrimination - "Nul ne peut faire l’objet d’une discrimination de la part d’une autorité publique quelle qu’elle soit, fondée, notamment, sur les motifs mentionnés au paragraphe 1." Les motifs mentionnés au paragraphe 1 sont ceux mentionnés dans l’article 14 de texte de 1950.

Comités des Ministres - Règles pénitentiaires européennes de 2006
Règle n° 63 : "Aucun détenu ne peut être puni deux fois pour les mêmes faits ou la même conduite."

b) Pacte social et civil du 16 décembre 1966 des Nations Unies ratifié par la France en 1980

"2.2. Les Etats parties au présent Pacte s’engagent à garantir que les droits qui y sont énoncés seront exercés sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l’opinion politique ou toute autre opinion, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.
6.1. Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit au travail, qui comprend le droit qu’a toute personne d’obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce droit. [...]
8.1. Les Etats parties au présent Pacte s’engagent à assurer :
a) Le droit qu’a toute personne de former avec d’autres des syndicats et de s’affilier au syndicat de son choix, sous la seule réserve des règles fixées par l’organisation intéressée, en vue de favoriser et de protéger ses intérêts économiques et sociaux. L’exercice de ce droit ne peut faire l’objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, dans l’intérêt de la sécurité nationale ou de l’ordre public, ou pour protéger les droits et les libertés d’autrui.
 14.7 . Nul ne peut être poursuivi ou puni en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure de chaque pays."

c) Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Convention concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 (N° 111)

1.1. Aux fins de la présente Convention, le terme "discrimination" comprend :
a) Toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, qui a pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de profession ;
b) Toute autre distinction, exclusion ou préférence ayant pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de chance ou de traitement en matière d’emploi ou de profession, qui pourra être spécifiée par le membre intéressé après consultation des organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs, s’il en existe, et d’autres organismes appropriés.
1.2. Les distinctions, exclusions ou préférences fondées sur les qualifications exigées pour un emploi déterminé ne sont pas considérées comme des discriminations.
1.3. Aux fins de la présente Convention, les mots "emploi" et "profession" recouvrent l’accès à la formation professionnelle, l’accès à l’emploi et aux différentes professions, ainsi que les conditions d’emploi.

d) Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948

23.1. "Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage. [...]"
23.2. "Toute personne a le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts."

4.2 Le droit national, générateur d’empêchements

Avant 1994, tous les condamnés en matière criminelle perdaient à vie leurs droits commerciaux, civils, civiques et familiaux. Pour les auteurs de délits, la privation durait certes "seulement" dix ans, mais elle était automatique. Depuis 1994, avec l’entrée en vigueur du nouveau code pénal, la privation de droits n’est plus automatique. Seule la juridiction qui rend le jugement peut l’imposer et elle ne peut excéder dix ans.
Malgré cette avancée, la réforme n’a touché que les personnes condamnées après le 1er mars 1994. Pour celles condamnées avant, qu’elles soient toujours incarcérées ou libres, les privations de droits demeurent.

Le Code pénal prévoit, au moment de la libération, des interdictions, incapacités, déchéances ou retraits de droits, injonctions de soins ou obligations de faire, immobilisations ou confiscations d’objets, fermetures d’établissements, affichage de la décision prononcée, diffusion de celle-ci, soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle (article 131-10). Voir en annexe l’exhaustivité des articles du code pénal énonçant les interdictions que subissent les personnes condamnées.
Il s’agit d’empêchements quotidiens pour les ancien(ne)s prisonnier(e)s.

Ces diverses interdictions relèvent, soit d’une peine accessoire, quand elles découlent automatiquement et implicitement de la condamnation pénale, soit d’une peine complémentaire, lorsqu’elles sont prononcées et énoncées par la juridiction de jugement. Il est à noter qu’aucune interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut résulter, en principe, de plein droit d’une condamnation pénale.

Cette privation de droits regroupe trois grands types d’interdictions, la juridiction peut prononcer l’interdiction de tout ou partie de ces droits.

a) Des interdictions professionnelles

Elles peuvent concerner l’accès à la fonction publique, comme nombre d’emplois privés, ou l’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27, d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.

b) Des interdictions des droits civiques, civils et de famille

Selon les modalités prévues par l’article 131-26 du Code pénal, cette interdiction porte sur le droit de vote, l’éligibilité, le droit d’exercer une fonction juridictionnelle ou d’être expert devant une juridiction, de représenter ou d’assister une partie devant la justice, le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations.
L’interdiction du droit de vote ou d’éligibilité prononcée emporte interdiction ou incapacité d’exercer une fonction publique (art. 131-26, 27 Code pénal).
Est concerné aussi le droit d’être tuteur ou curateur ; cette interdiction n’excluant pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d’être tuteur ou curateur de ses propres enfants. L’interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

Toutefois, pour les personnes condamnées avant 1994 (année d’entrée en vigueur du nouveau code pénal), cette règle d’un maximum dix ans en cas de condamnation pour crime et de cinq ans en cas de condamnation pour délit ne s’applique pas. La rétroactivité d’une loi, lorsqu’elle entraîne des disposition moins sévères que les dispositions antérieurs est effective sauf si les infractions commises avaient "donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée" (article 112-1 du code pénal), c’est-à-dire lorsque la décision de justice n’est plus susceptible d’une voie de recours suspensive et qu’elle est exécutoire.

L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, est prévue pour les infractions suivantes :
- atteinte à l’intégrité physique ou psychique de la personne (Article 221-9)
- mise en danger de la personne (Article 223-16)
- atteinte aux libertés de la personne (Article 224-9)

c) Des interdictions d’aller et venir

Il s’agit de l’interdiction d’aller et venir sur un secteur géographique particulier, comme l’ITF (Interdiction du territoire français), ou l’interdiction de paraître dans certains départements ou régions, voire d’être assigné dans un département ou une région.
5. Le casier judiciaire, les fichiers, socles des empêchements

Pour le délinquant, le casier judiciaire constitue la prolongation de la peine infligée, voire, une peine supplémentaire. Dans sa fonction extrajudiciaire de divulgation, l’existence d’un casier judiciaire peut interdire toute chance de réintégration.
Dès lors, il est important de connaître les règles de fonctionnement du casier judiciaire pour comprendre les discriminations que leur application peut entraîner.